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En mai 2009, le Groupe interparlementaire
Canada-États-Unis a célébré son 50e anniversaire. Le sénateur Jerry
Grafstein est coprésident de la Section canadienne du Groupe depuis 14 ans,
occupant ainsi ce poste plus longtemps que tout autre président dans l’histoire
du Groupe. Il a fait part de ses réflexions sur celui-ci à Gary Levy lors d’une
interview réalisée en avril 2009.
Qu’est-ce que le Groupe interparlementaire
Canada-États-Unis et à quoi attribuez-vous son importance?
Le Groupe doit ses origines à deux membres du
Congrès américain, Brooks Hays et Frank Coffin. Pendant les années 1950, ils ont
participé à une mission d’étude au Canada. Ils ont découvert l’existence d’un
grand nombre de pommes de discorde entre les deux pays, des approvisionnements
en matériel de défense aux questions commerciales. Ils ont recommandé, entre
autres, la formation d’une association de législateurs des deux pays. Chaque
année depuis 1959, environ 24 législateurs de chaque pays se réunissent pour
discuter de questions d’intérêt commun.
L’importance du Groupe saute aux yeux. Les
économies du Canada et des États-Unis sont intégrées. Des biens d’une valeur de
milliards de dollars franchissent la frontière tous les jours et, selon
certaines estimations, la moitié de tous les emplois au Canada sont tributaires
de nos échanges commerciaux avec les États-Unis. Nous sommes le plus important
fournisseur d’énergie des États-Unis. Le niveau de vie et le bien-être de
populations des deux côtés de la frontière dépendent de bonnes relations
politiques et économiques entre les deux pays.
Quand avez-vous commencé à participer au Groupe
et comment cela est-il arrivé?
C’est en 1987, à Vancouver, que j’ai participé à
ma première réunion. J’ai également assisté à la réunion de 1995 à Huntsville,
en Ontario. Le sénateur Bud Olson, qui était coprésident, a annoncé qu’il
partait à la retraite et il m’a encouragé à poser ma candidature au Comité
exécutif de la Section canadienne. Il m’a dit que j’avais ce qu’il fallait,
l’intérêt pour le Groupe et l’énergie, pour réussir comme coprésident. À son
avis, la Section canadienne avait besoin d’une personne possédant les atomes
crochus nécessaires pour s’entendre avec les Américains.
Ma première conférence en ma qualité de
coprésident s’est déroulée en 1996 et elle a eu un caractère plutôt inhabituel,
en ce sens qu’elle a entièrement eu lieu à bord d’un traversier d’Alaska Marine
assurant la liaison entre Prince Rupert et l’Alaska. À un certain moment, nous
voguions à proximité d’un iceberg et le capitaine a annoncé qu’il envoyait
certains membres de l’équipage sur l’iceberg pour prélever de la glace qu’on
retrouverait dans nos cocktails ce soir-là. Je lui ai dit qu’au Canada, nous
faisions nous-mêmes ce qu’on demande à un équipage et j’ai insisté pour
accompagner celui-ci. Le capitaine n’aimait pas l’idée de me faire revêtir tout
l’équipement de sécurité, mais je ne voulais pas manquer l’occasion de poser le
pied sur un iceberg.
John Chafee, sénateur du Rhode Island (ancien
secrétaire de la Marine de Richard Nixon) a entendu la conversation et a dit
qu’il voulait y aller aussi. À la consternation du capitaine, une demi-douzaine
de législateurs canadiens et américains se sont entassés dans le canot
pneumatique et se sont dirigés vers l’iceberg. Je ne sais pas si c’est ce que
voulait dire le sénateur Olson quand il parlait de s’entendre avec les
Américains, mais cela m’a certainement fait bien connaître dans le Groupe. Des
expériences de ce type aident beaucoup à cimenter des relations qui se révèlent
fort utiles en politique.
Vous inquiétez-vous des critiques voulant que ces
voyages soient des excursions gratuites et un gaspillage d’argent?
Quiconque soutient ce point de vue ne
comprend pas l’importance des contacts personnels et sociaux pour la prise de
décisions sur les politiques publiques. En 2000, la conférence annuelle a eu
lieu à bord d’un autre bateau à vapeur sur le Mississippi, le Delta Queen. Alors que nous
descendions la rivière, les Canadiens ont été frappés par l’immensité et le vide
du cœur du territoire américain. À Natchez, nous avons fait une tournée en
autocar de la ville et d’une vielle plantation. Ma femme a remarqué deux membres
noirs du Congrès assis au fond de l’autocar et elle leur a demandé de
l’accompagner lors de la visite de la plantation.
Après la visite, nous avons rencontré Trent Lott,
qui était leader de la majorité au Sénat et l’une des personnes les puissantes
au Congrès. Les programmes de visites des conférences n’ont pas tous été aussi
exotiques que ces deux excusions en bateau, mais chacun d’eux a offert aux
législateurs des occasions de voir des parties du continent nord-américain
qu’ils ne connaissaient pas nécessairement, de rencontrer des dirigeants
nationaux, locaux ou d’États, et de discuter dans des cadres soit officiels,
soit officieux, de questions qui préoccupaient leurs électeurs et leur pays.
En quoi cela vous aide-t-il à jouer votre rôle de
législateur?
Je vous donne un exemple récent. J’étais en route
vers Washington pour y tenir des réunions lorsque mon personnel m’a appris que
la Chambre des représentants venait d’adopter un projet de loi contenant
d’importantes mesures protectionnistes susceptibles de nuire aux manufacturiers
canadiens. Lors d’un appel à l’ambassade du Canada, j’ai découvert qu’elle
n’avait pas pu plaider le dossier de notre pays directement auprès des
législateurs. J’ai appelé le sénateur Charles Grassley, membre de longue date du
Groupe, et ai demandé à le rencontrer. Il m’a breffé sur le contexte de ce
projet de loi qui, selon lui, disposait de suffisamment de voix pour être adopté
par le Sénat cette semaine-là. Il m’a aidé à organiser une réunion avec le
leader de la minorité au Sénat, Mitch McConnell, qui était favorable à notre
cause, mais il m’a dit qu’il leur manquait deux ou trois voix pour pouvoir faire
obstruction à l’adoption du projet de loi.
Alors que le vote était imminent et que le timbre
sonnait, j’ai rencontré quelques sénateurs démocrates dans les couloirs. Je les
connaissais très bien grâce aux réunions du Groupe Canada-États-Unis et j’ai
essayé de les convaincre de s’opposer à la disposition protectionniste. Dans ce
cas précis, je n’ai pas réussi à faire modifier le projet de loi, mais, sans les
contacts maintenus au fil des ans au sein du Groupe, je n’aurais pas eu la
possibilité d’essayer. En tout état de cause, il faut posséder une vision à long
terme de l’activité politique et tirer des leçons de ses expériences.
Quelle leçon avez-vous tirée de cette expérience?
Quiconque comprend la vie politique américaine
sait que, si vous voulez avoir quelque influence que ce soit, vous devez
conclure des alliances et diffuser de l’information bien avant que le Congrès ne
soit saisi des enjeux. Nous avons besoin d’un système d’alerte rapide pour
cerner les questions susceptibles d’avoir des effets nocifs au Canada. Il nous
faut avoir des amis et des alliés à l’intérieur et à l’extérieur des milieux
politiques pour plaider notre cause à Washington.
N’est-ce pas le travail de l’ambassade du Canada
à Washington?
J’ai travaillé avec plusieurs ambassadeurs du
Canada, qui étaient tous des personnes très compétentes. Alan Gotlieb, en
particulier, a reconnu l’importance d’œuvrer auprès du Congrès et du pouvoir
exécutif. En fait, le Canada a mis sur pied le Secrétariat de défense des
intérêts canadiens à l’ambassade. Il dispose d’un haut fonctionnaire et
d’effectifs chargés de traiter avec le Congrès et de faciliter les contacts
entre les législateurs canadiens, aussi bien fédéraux que provinciaux, et les
parlementaires américains. Toutefois, l’ambassade fait partie du pouvoir
exécutif, et les membres du Congrès se méfient beaucoup de leur propre
gouvernement, et encore plus des représentants d’autres pays. Il est donc
beaucoup plus efficace que des parlementaires canadiens plaident notre cause
auprès des sénateurs et des représentants, à condition qu’ils le fassent
efficacement.
Quelle est l’efficacité de la Section canadienne?
À mes débuts, en 1987, le Groupe permettait
d’agréables échanges annuels avec nos homologues américains. Deux facteurs ont
modifié le contexte de ces rapports. Il y a eu d’abord l’Accord de libre-échange
canado-américain (devenu plus tard l’Accord de libre-échange nord-américain),
qui a de beaucoup complexifié les rapports. Le deuxième facteur, ce furent les
attentats terroristes du 11 septembre 2001, qui ont fait de la sécurité un
important nouvel élément du dossier.
Devenu coprésident, je me suis dit qu’il nous
fallait d’autres occasions de nous rencontrer entre les réunions annuelles. Nous
avions besoin, aussi, de possibilités que nos membres canadiens participent à
des réunions avec des législateurs des États, des gouverneurs, des maires et des
organismes privés œuvrant dans le domaine des relations canado-américaines. Je
me suis employé à obtenir la modification du système de points utilisé pour les
voyages des membres. Les sénateurs et les députés peuvent maintenant utiliser
une partie de leurs points pour se rendre à Washington, à condition que leurs
voyages soient liés à leur travail de parlementaires. Cela a beaucoup facilité
l’action de la Section canadienne. Nous envoyons maintenant des membres à des
réunions de législateurs des États, de gouverneurs et d’organismes publics et
privés qui s’occupent des relations canado-américaines.
Obtenir une influence est une tâche ardue qui
demande de l’énergie, de la continuité et des ressources. Je crois que la
Section canadienne est plus active et plus efficace que lorsque j’ai commencé
comme président.
Pourquoi vous concentrez-vous sur les gouverneurs
américains?
Les gouverneurs sont des acteurs politiques
particulièrement importants qui ont une grande incidence sur les intérêts
économiques et commerciaux du Canada.
Ces cinq ou six dernières années, nous avons pris
contact et développé des relations de travail avec plus de 50 gouverneurs
américains, notamment le gouverneur de la Pennsylvanie, Edward Rendell,
actuellement président de la Conférence nationale des gouverneurs, le gouverneur
du Nouveau-Mexique, Bill Richardson, l’ancien gouverneur de l’État de New York,
George Pataki, le gouverneur du Minnesota, Tim Pawlenty, l’ancien gouverneur de
l’Arkansas, Mike Huckabee, le gouverneur du Vermont, Jim Douglas, le gouverneur
du Montana, Brian Schweitzer, le gouverneur du Maine, John Balducci, le
gouverneur du Mississippi, Haley Barbour, le gouverneur de l’Utah, Jon Huntsman,
la gouverneure du Michigan, Jennifer Granholm, le gouverneur de la Caroline du
Sud, Mark Sanford, le gouverneur du Maryland, Martin O’Malley, la gouverneure de
l’Alaska, Sarah Palin, et la gouverneure de l’État de Washington, Christine
Gregoire. Ces gouverneurs représentent des États qui entretiennent activement
des relations commerciales avec le Canada.
Y a-t-il des parlementaires canadiens aux
Communes qui ont été aussi actifs que vous?
J’ai travaillé avec quatre coprésidents de la
Chambre des communes. Pendant plusieurs années, c’était Joe Comuzzi. Il
s’intéressait particulièrement aux transports et aux questions liées à la Voie
maritime du Saint-Laurent. Lui a succédé Greg Thompson, du Nouveau-Brunswick,
qui a plus tard été nommé au Cabinet. Rob Merrifield a fait valoir le point de
vue de l’Ouest dans son poste de coprésident. Il connaissait très bien les
questions de l’énergie et des sables bitumineux. Il a également été nommé au
Cabinet et les ministres ne peuvent pas assister aux réunions du Groupe.
Actuellement, le coprésident canadien est Gord Brown, élu en mars 2009 député
d’une circonscription située à la frontière avec les États-Unis. Je suis
persuadé qu’il participera très activement et avec dynamisme aux travaux du
Groupe.
Abstraction faite des coprésidents, Wayne Easter
est un membre de longue date et il s’intéresse principalement au dossier de
l’agriculture. Il est devenu très ami avec Collin Peterson, du Minnesota,
président du Comité de l’agriculture de la Chambre des représentants. Au fil de
mes années au sein du Groupe, j’ai vu de nombreux législateurs canadiens et
américains établir des relations interpersonnelles très proches. À mon avis,
leurs relations de travail ne peuvent qu’en bénéficier.
Quels ont été les Américains les plus influents
au sein du Groupe?
Deux sénateurs de l’Alaska, Frank Murkowski et
Ted Stevens, ont été très actifs dans le Groupe et ont présidé la Section
américaine à divers moments. Parmi les autres sénateurs présidents à mon époque,
je mentionnerai Mike Crapo, de l’Idaho, et Amy Klobuchar, du Minnesota. Parmi
les délégués de la Chambre des représentants, j’ai travaillé avec Donald
Manzullo, de l’Illinois, Amo Houghton, de l’État de New York, et James Oberstar,
du Minnesota. M. Oberstar participe au Groupe depuis près de 27 ans, ce qui en
fait le doyen.
Sam Gibbons, de la Floride, a souvent participé
aux réunions du Groupe, sans jamais présider celui-ci. Il a assisté à
20 réunions échelonnées sur trois décennies et, pendant une bonne partie de
cette période, il était président du Sous-comité du commerce du Comité des
relations étrangères de la Chambre des représentants. Il pouvait y avoir, à
n’importe quel moment, de nombreux projets de loi protectionnistes à diverses
étapes du parcours législatif au Congrès et il avait un certain contrôle sur les
projets de loi qui se rendaient jusqu’à la Chambre. Il était un ami du Canada et
se qualifiait de partisan du libre-échange.
Sam Gibbons était également mon mentor, en
quelque sorte, lorsque j’étais un jeune sénateur canadien s’efforçant de s’y
retrouver dans le fonctionnement du Congrès. Il m’a dit que la cordialité,
l’entregent et une attitude respectueuse constituaient la clé d’une carrière
couronnée de succès. Il a insisté sur l’importance de l’interaction sociale pour
obtenir des résultats à Washington. Le sénator Robert Byrd, de la
Virginie-Occidentale, préconisait la même approche.
Dante Fascell, également de la Floride, a
participé fréquemment aux réunions. Sa connaissance de la politique étrangère
était phénoménale. Un autre Floridien, Porter Goss, m’a fait forte impression.
Il était brillant et il a plus tard été nommé directeur de la Central
Intelligence Agency. J’ai également rencontré Joe Biden à l’une des réunions du
Groupe. Il était sénateur du Delaware et il est maintenant vice-président de son
pays. D’autres législateurs américains se sont intéressés particulièrement au
Canada à mon époque : Cliff Stearns, de la Floride, George Voinovich, de l’Ohio,
Patrick Leahy, du Vermont, Fred Upton, du Michigan, Mark Souder, de l’Indiana,
Louise Slaughter, de l’État de New York, et David Drier, de la Californie.
La liste est très longue. Les Canadiens se
plaignent parfois de l’ignorance des Américains au sujet du Canada. C’est vrai
jusqu’à un certain point, mais n’oublions pas qu’un certain nombre de
législateurs américains sont très bien informés. Il faut tout mettre en œuvre
pour avoir de bons rapports avec eux.
Il y a sûrement certains membres du Congrès qui
sont de moins grands amis du Canada?
Bien sûr, dans de nombreux domaines, les intérêts
des deux pays s’opposent. Nous avons parfois des discussions animées où nous ne
pouvons qu’être d’accord sur notre désaccord. La question du bois d’œuvre en est
un exemple. N’oubliez pas que les membres de la Chambre des représentants
doivent se faire élire tous les deux ans. Certains d’entre eux sont soumis à
d’énormes pressions pour défendre la position des États-Unis sur le bois
d’œuvre. Nous ne sommes pas arrivés à régler cette question, mais cela a été le
cas aussi de nombreux gouvernements, de tribunaux quasi judiciaires et
d’arbitres. Nos efforts ont, à la longue, aidé à la conclusion d’un « accord sur
le bois d’œuvre ».
Cela dit, je tiens à souligner aussi qu’il est
extrêmement important de ne pas limiter nos contacts aux seuls amis du Canada.
J’ai tenté pendant des années d’obtenir une rencontre avec Jesse Helms, de la
Caroline du Sud, qui présidait le Comité des affaires étrangères du Sénat. Il
était coauteur de la loi Helms-Burton, qui rendait coupable d’une infraction
toute entreprise, même canadienne, qui faisait des affaires avec Cuba. Ni mon
bureau, ni l’ambassade n’avaient pu obtenir de réunion avec lui.
Lors d’un voyage à Washington, j’ai rendu une
visite de courtoisie au sénateur Frank Murkowski. Il m’a demandé s’il pouvait
faire quelque chose pour moi. Je lui ai dit : « Oui. Pouvez-vous m’obtenir une
rencontre avec le sénateur Helms? » Quelques minutes plus tard, il m’a appelé
pour me dire de me présenter au bureau du sénateur Helms à 14 heures. « Autre
chose? », m’a-t-il demandé. « Oui », ai-je dit. « Appelez un photographe, parce
que personne ne me croira. »
Comment s’est passée la rencontre avec le
sénateur Helms?
C’était un homme qui en imposait beaucoup, même
s’il avait plus de 80 ans et était en béquilles le jour où je l’ai rencontré. Il
m’a immédiatement demandé si j’étais l’auteur du projet de loi dit
« anti-Helms », qui avait pour but de rendre inopérantes certaines dispositions
de la loi Helms-Burton dans le cas des entreprises canadiennes faisant affaire
avec Cuba. Il a exprimé une admiration réticente pour cette loi et m’a demandé
ce que je voulais. Je lui ai répondu que je ne voulais rien d’autre que l’aider,
lui et son État.
Cette entrée en matière l’a quelque peu
décontenancé. Puis, je lui ai dit que l’Ontario était le principal partenaire
commercial de la Caroline du Sud et je lui ai montré des fiches préparées par
l’ambassade du Canada qui indiquaient les chiffres. Il a fait venir son chef de
cabinet, celui-là même qui avait refusé mes demandes pendant des années, et lui
a demandé si ces chiffres étaient exacts. Je lui ai dit que nous devrions œuvrer
de concert pour organiser des échanges et renforcer l’énorme relation
commerciale entre l’Ontario et la Caroline du Sud. L’idée lui a plu et je crois
qu’il y a effectivement eu de tels échanges.
Je lui ai également demandé de songer à assister
à l’une de nos rencontres Canada-États-Unis. Bien qu’il ne l’ait jamais fait,
j’étais convaincu que cette réunion de cinq minutes avait valu la peine. Nous
devons pouvoir interagir avec civilité avec nos adversaires.
Combien de temps consacrez-vous au Groupe?
Je ne découpe pas mon temps en tranches comme
cela. Je vous donne un exemple. Après les événements du 11 septembre, j’ai
organisé à New York une manifestation sur le thème « Le Canada aime New York ».
Le but visé était d’afficher la solidarité des Canadiens avec les New Yorkais en
proie à leurs difficultés. J’ai réservé la salle de bal Roseland au centre de
Manhattan, qui peut accueillir 3 500 personnes. Nous avons invité un certain
nombre de Canadiens bien connus. Même le premier ministre Chrétien s’est déplacé
à New York à la dernière minute pour l’occasion.
L’idée a fait boule de neige et de 25 000
à 30 000 Canadiens se sont présentés. Un énorme écran a été installé sur la 53e Rue
à l’intention de la foule qui débordait. Mon ami du Groupe Canada-États-Unis,
Amo Houghton, m’a aidé à obtenir du gouverneur de l’État de New York, George
Pataki, et du maire Rudy Giuliani qu’ils prennent la parole. Il nous a remis une
déclaration intitulée « Journée "Le Canada aime New York" ». J’ai même convaincu
la Maison-Blanche de faire envoyer à notre groupe de bénévoles une lettre du
président Bush!
Cela a été une expérience extraordinaire, très
touchante. Des mordus d’histoire ont affirmé, avec un brin de raillerie, qu’il
s’était agi de la plus grande invasion des États-Unis depuis la guerre de 1812.
A-t-elle eu lieu dans le cadre du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis?
Non. Aurait-on pu la tenir sans les contacts et les connaissances que j’ai
acquis grâce à mon travail au sein du Groupe? Je ne le crois pas.
Le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis
conjugue de manière unique le traitement officiel de dossiers et des amitiés
personnelles entre des législateurs de différents pays. Voilà pourquoi il serait
très difficile de comptabiliser isolément le pourcentage de mon temps que j’y
consacre.
Comment vos efforts ont-ils été reconnus?
J’ai reçu plusieurs honneurs, mais deux des plus
grands ont été ma désignation à titre de commandant honoraire du Corps des
Marines des États-Unis et l’obtention de la casquette de commandant de Marines
très convoitée. Puis, j’ai été nommé chef honoraire du service d’incendie de New
York et j’ai reçu la casquette correspondante. Je ne crois pas que beaucoup de
Canadiens peuvent déclarer être à la fois commandant honoraire de Marines et
chef honoraire du service d’incendie de New York!
À votre avis, connaît-on les intérêts canadiens
aux États-Unis et en est-on conscient?
Non, mais c’est à nous de les faire connaître. Je
lis des journaux américains tous les jours et je regarde régulièrement les
chaînes d’information américaines. Presque sept jours par semaine, je parle avec
des Américains et j’échange avec eux des courriels sur des questions touchant
les affaires canado-américaines. Il n’y a pas d’autre façon de se tenir au
courant des enjeux, d’importance variable, qui surgissent aux États-Unis et qui
ont des incidences pour le Canada.
Même mes activités au sein d’autres organisations
internationales, comme l’Organisation pour la sécurité et la coopération en
Europe, ont élargi mes contacts au Congrès et m’ont aidé à défendre les intérêts
du Canada auprès de membres de celui-ci, par exemple, Steny Hoyer, du Maryland,
actuellement leader de la majorité à la Chambre, Alcee Hastings, de la Floride,
Benjamin Cardin, du Maryland, Chris Smith, du New Jersey, Diane Watson, de la
Californie, et l’ancienne membre du Congrès, Hilda Solis, actuelle secrétaire au
Travail dans le gouvernement Obama.
À d’autres occasions, j’ai rencontré Gary
Ackerman et Eliot Engel, de l’État de New York, Barney Frank, du Massachusetts,
Bart Stupak, John Dingle et Thaddeus McCotter, du Michigan, Henry Brown, de la
Caroline du Sud, Henry Waxman et Loretta Sanchez, de la Californie. Ce sont tous
des dirigeants démocrates de la Chambre.
J’ai rencontré des membres clés du Caucus noir du
Congrès, y compris sa présidente, Carolyn Kilpatrick, du Michigan, et le whip de
la majorité démocrate à la Chambre, James Clyburn, de la Caroline du Sud.
Je suis toujours à la recherche d’hommes et de femmes de
partout aux États-Unis sur lesquels je peux compter pour écouter d’une oreille
sympathique des arguments en faveur des intérêts vitaux du Canada. Par exemple,
lors d’une récente réunion à Vienne à laquelle participaient des membres du
Congrès américain, on m’a invité à me joindre à eux pour une discussion animée
organisée par l’ambassadeur de leur pays sur la future politique relative à
l’Afghanistan. Une fois de plus, un échantillon plus large du Congrès, à la fois
des parlementaires et des membres de leur personnel, discutaient d’une question
de politique étrangère qui touche profondément le Canada.
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