Randy Colwell
The Party that Changed Canada: The New
Democratic Party, Then and Now, Lynn McDonald, députée, Toronto,
Macmillan of Canada, 1987, 265 pages.
Les observateurs de la scène politique canadienne ont appliqué diverses étiquettes
au système de partis. Le long règne des gouvernements libéraux successifs a
fait dire à certains que le Canada était dirigé par un seul parti dominant. D'autres
reconnaissent que le Parti progressiste conservateur, tant au pouvoir que dans
l'opposition, a largement contribué au système de partis du Canada, et
préfèrent décrire celui-ci comme un régime bipartite. Certains analystes, que
ces deux catégories laissent insatisfaits, ont tour à tour parlé d'un système
qui était plus que bipartite sinon multipartite.
Lynn McDonald, dans The Party That Changed Canada, admet sans doute que le Canada
possède un système tripartite bien développé. Elle affirme en effet, comme le
titre de son ouvrage l'indique, que le Nouveau Parti démocratique (NPD), et son
prédécesseur, la Fédération du Commonwealth coopératif (FCC) ont eu une
profonde incidence sur l'évolution des dimensions politiques, sociales et
économiques du Canada, même s'il n'ont jamais pris la
tête du pays ni formé d’opposition officielle fédérale.
D'après l'auteure, des programmes comme l'assurance-maladie, les pensions de
vieillesse, la création d'emplois, l'assurance-chômage et les droits de la
personne, sans parler des entités culturelles telles que la Société
Radio-Canada, tirent leurs origines de la Fédération du Commonwealth coopératif
et non des partis au pouvoir à l'époque. En fait Mme Macdonald prétend que ces
programmes, qui ont effectivement transformé le Canada, n'ont été instaurés par
les législateurs que de mauvaise grâce et uniquement parce que les premiers
ministres libéraux ou conservateurs en avaient cyniquement perçu la valeur
électorale. Ces allégations sont parmi les plus controversées de l'ouvrage et
des lecteurs sérieux ne manqueront certainement pas de les contester.
Le livre est facile à lire et n'est pas alourdi par des détails inutiles par son style et
sa façon de structurer les chapitres, l'auteure transporte rapidement le
lecteur des origines de la FCC, dans les provinces des Prairies, à la longue
liste de ses réalisations en tant que parti d'opposition. Bien que bon nombre
de passages soient longuement rhétoriques, l'auteure s'appuie sur une bonne
documentation pour étayer ses affirmations.
Le troisième chapitre « Virtue Is Its Own Reward? » explique les diverses raisons
pour lesquelles la FCC et plus tard le NPD n'ont pas réussi à obtenir
suffisamment de voix pour former le gouvernement national. Mme McDonald réfute
les nombreux arguments, qui ont de tout temps servi a expliquer les échecs
électoraux de la FCC et du NPD entre autres que ce parti n'est pas suffisamment
gauchiste ou qu'il l'est trop, qu'il est dominé par les syndicats, etc. Pour elle
ce sont des arguments fallacieux.
L'auteure consacre beaucoup d'attention aux médias canadiens et prétend qu'ils n'ont pas
donné à la FCC ou au NPD la couverture méritée. Tout en admettant que les
préjugés flagrante sont rares (p. 103), elle prétend que les médias simplifient
exagérément les messages du NPD et véhiculent trop souvent l'image d'un parti
financièrement irresponsable. A cela, Mme McDonald rappelle les réussites
financières de gouvernements provinciaux néo-démocrates, celui de la
Saskatchewan plus particulièrement. Elle termine sa critique des médias en
s'attaquant à la télévision qu'elle considère comme un instrument ankylosant
qui suscite un sentiment d'impuissance et de désarroi chez les Canadiens.
La doctrine socio-démocrate du NPD repose sur le principe que l'État doit jouer un
rôle actif sur les plan social et économique. Bon nombre de socio-démocrates
canadiens suivent, presque avec envie, les succès de leurs homologues des pays
européens en espérant que le NPD suivra leur exemple. Mme McDonald examine
aussi la situation de ces pays et attribue les succès des partis
socio-démocrates à un haut degré de syndicalisation et à une participation de
longue date à la vie politique. Il est difficile, à tout le moins, de comparer
les partis socio-démocrates d'Europe et d'ailleurs avec celui du Canada, et
l'auteure n'insiste pas suffisamment sur les différences entre le développement
politico-culturel et historique qui distinguent le Canada de l'Europe.
Peut-être le chapitre 6 est-il celui qui donne le plus matière à réflexion, car l'auteure
y «démystifie» la question du budget et expose le programme économique du NPD.
Elle prouve non seulement que le Canada peut se permettre d'appliquer des
programmes sociaux, mais aussi qu'il y a place pour l'amélioration et
l'expansion de ces programmes considérant les exemptions fiscales et les
subventions accordées aux sociétés.
Contrairement à beaucoup d'ouvrages qui traitent de la politique canadienne, celui de Mme
McDonald ne s'adresse pas aux mordus de la politique curieux des événements et
des personnalités. En effet, il a été écrit, semble-t-il, pour l'ensemble de
l'électorat et il intéressera probablement surtout le citoyen moyen. Les
néo-démocrates se serviront sans doute des arguments qui y sont exposés pour
essayer de convaincre les électeurs indécis de voter pour eux.
Les sondages d'opinion publique révèlent que la popularité du NPD a
considérablement augmenté. Ce parti, comparativement plus jeune que les partis
libéral et progressiste-conservateur, a encore beaucoup de chemin à parcourir
avant de pouvoir gouverner le pays. Si l'optimisme qui transpire de l'ouvrage
de Mme McDonald se traduit par un gain de sièges à la Chambre des communes,
peut-être le NPD aura-t-il davantage l'occasion de transformer le visage du
Canada dans les années à venir.
Randy Colwell
Stagiaire parlementaire
|