John Reynolds
Décision concernant le statut des terrains adjacents
à l'édifice de l'Assemblée législative, rendue par le Président John Reynolds de
l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique, le 9 avril 1987.
Contexte : Le 9 avril dernier, le chef de
l'opposition, M. Skelley, soulevait une question de privilège concernant le
droit de manifester en s'installant sur les terrains adjacents à l'édifice de
l'Assemblée législative.
Décision du Président John Reynolds : Hier après-midi, l'honorable chef de l'opposition, se
prévalant de l'article 26 du Règlement de l'Assemblée législative, soulevait une
question de privilège relativement aux événements récemment survenus sur les
pelouses situées devant l'édifice de l'Assemblée.
J'aimerais d'abord remercier l'honorable député d'avoir eu
l'amabilité de me saisir de cette affaire avant de la soulever en
Chambre.
Les honorables députés reconnaîtront d'abord qu'ils
jouissent de certains privilèges, à titre individuel et collectif.
Leurs privilèges individuels sont :
a) la liberté de parole dans un débat; et
b) l'immunité d'arrestation.
Leurs privilèges collectifs sont :
a) l'accès à l'Assemblée;
b) le droit de décider de sa composition;
c) le droit de réglementer ses procédures;
d) le pouvoir de sévir contre ceux qui la
méprisent;
e) le pouvoir de convoquer des témoins; et
f) les privilèges énoncés dans la Legislative Assembly
Privilege Act.
Tout privilège est, de par sa nature, octroyé. Les
privilèges du Parlement sont des droits (et j'insiste) qui sont absolument
indispensables à l'exercice des pouvoirs du Parlement. Ils sont accordés à tous
les députés parce que la Chambre serait dans l'incapacité de s'acquitter de ses
fonctions si elle ne pouvait librement disposer des services de tous ses
membres; ces privilèges sont également octroyés à chacune des chambres pour la
protection de ses membres et la sauvegarde de son autorité et de sa
dignité.
La présidence doit décider aujourd'hui si oui ou non les
privilèges énoncés ci-haut ont été violés par ceux qui ont posé les gestes
décrits par l'honorable chef de l'opposition hier.
La présidence doit également signaler que la compétence du
Président de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique en cette matière
n'a jamais été clairement définie et que la Chambre a déjà été saisie de
problèmes similaires qui lui ont été soumis dans un rapport déposé aux termes de
la Loi sur la Réforme des procédures législatives en 1984. À la page 41 de ce
rapport, on recommandait que les environs du Parlement soient définis comme
étant les terrains et les édifices bornés par les rues Belleville, Government,
Superior et Menzies et que cette définition soit incluse dans une loi créant un
Conseil de la régie interne.
La présidence estime que la question soulevée hier par
l'honorable chef de l'opposition aurait pu être examinée par ce conseil et que
les précédents dans d'autres parlements du Commonwealth tendent à confirmer
cette opinion.
Le droit de manifester et de protester est inhérent au
principe de la démocratie parlementaire. La question qui se pose maintenant à la
présidence, et donc à l'Assemblée, est de savoir si oui ou non il y a lieu de
limiter ces droits, notamment lorsque les gestes posés ont pour cadre les
terrains adjacents à l'Assemblée législative. Le Président, qui est et demeure
au service de l'Assemblée, se voit placé dans une situation ingrate dans la
mesure où sa capacité de trancher ce genre de décision n'est pas évidente.
Espérons que la création d'un conseil de la régie interne, annoncée par le
premier ministre, permettra bientôt de dissiper plusieurs de ces
incertitudes.
La question soulevée par l'honorable chef de l'opposition a
mis brusquement en lumière ces problèmes de compétence, bien que, d'après les
textes faisant autorité, les faits décrits ne peuvent être qualifiés, à première
vue, de violation de privilège.
Dans leur intérêt, j'invite tous les députés à se référer à
une interprétation détaillée de la question donnée dans Parliamentary Privilege
in Canada de Joseph Maingot, dans Parliamentary Practice de Sir Erskine May à la
page 92 de la 19e édition de Parliamentary Practice et dans Parliamentary Rules
and Forms de Beauchesne à la page 11 de la 5e édition.
La présidence se doit de commenter également un nouvel
incident, rapporté par l'honorable chef de l'opposition au cours de la séance de
ce matin, qu'elle interprète comme une répétition de celui survenu hier sur les
pelouses de l'Assemblée législative. Après le premier incident, le Président
avait ordonné au sergent d'armes de veiller à ce que ni lui ni ses agents ne
participent à l'évacuation forcée des personnes ou des objets présents sur les
pelouses de l'Assemblée. Ces instructions demeureront en vigueur tant que la
présidence n'aura pas reçu d'autres ordres de la Chambre, ou d'un conseil de la
régie interne dûment constitué. Cette procédure ne dispense nullement, et
j'insiste là-dessus, la présidence de s'acquitter des responsabilités qu'elle
reconnaît avoir en matière de sécurité dans l'enceinte des édifices
parlementaires, responsabilités qu'elle continuera d'assumer conformément au
Règlement de la Chambre et aux coutumes et pratiques parlementaires
établies.
|