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Depuis le milieu des années 30, l'Assemblée législative de l'Alberta a été dominée par un
seul parti : le Crédit Social de 1935 à I971 et les progressistes-conservateurs
de 1971 à ce jour. Avant 1986, il n'est arrivé qu'une seule fois que
l'opposition détienne plus de 20 sièges. Le Parti libéral a fait élire son
dernier député en 1967 et les néo-démocrates n'ont jamais eu plus de deux
représentants à l'Assemblée. Mais en 1986, la population de l'Alberta a élu
61 conservateurs, 16 néo-démocrates, quatre libéraux et deux
membres du Parti représentatif. La composition de la nouvelle Assemblée
a-t-elle changé son mode de fonctionnement? Nous avons posé la question à un
membre de chacun des quatre partis : le conservateur Greg Stevens qui
représente Banff-Cochrane depuis 1979, la néo-démocrate Pam Barrett, députée
d'Edmonton-Highlands, la libérale Bettie Hewes, qui représente
Edmonton-Goldbar, et Ray Speaker, chef du Parti représentatif de l'Alberta et
député de Little Bow. Les entrevues ont été menées en mai 1987 par John
McDonough, du Service de recherche de l'Assemblé législative de l'Alberta, et
Gary Levy.
Que faisiez-vous avant de poser votre candidature à l'Assemblée?
Greg Stevens : Au début des années 70, alors que j'étais gérant de la villa de Banff, j'ai participé à des négociations avec des fonctionnaires
fédéraux au sujet de l'autonomie de la ville. C'est en fait là qua j'ai
rencontré le premier ministre Peter Lougheed pour la première fois. Sa famille
avait loué une maison à Banff et on m'a téléphoné un jour pour me dire qu'il
allait venir pour payer son loyer. Je l'ai rencontré une autre fois quand je
suis devenu vice-président de la Société de logement de l'Alberta. En 1975, je
me suis occupé du projet d'habitation de Fort McMurray qui a permis de
construire 2 600 logements. Je me suis ensuite installé à Calgary pour
travailler à la construction de logements pour personnes âgées.
Le député que j'ai remplacé était alors sur le point de se retirer. Je suis allé voir un
ancien ministre et ami de la famille, David King, qui a passé une heure à
m'énumérer les raisons pour lesquelles je ne devrais pas me présenter : stress,
manque à gagner, absence de vie privée. Je lui ai demandé pourquoi il n'avait
pas lui-même renoncé à la politique. Il a alors passé trois heures à me parler des avantages de la vie publique. J'ai donc
décidé de poser ma candidature et j'ai été élu en 1979.
Bettie Hewes : Ayant travaillé pendant des années pour le Conseil de planification
sociale d'Edmonton, j'ai fait partie de nombreux conseils et commissions. En
1974, j'ai été élue au conseil municipal d'Edmonton où
j'ai siégé pendant dix ans. En 1984, le ministre fédéral des Transports, Lloyd Axworthy, cherchait une femme de l'Ouest, ne représentant pas Bay Street et
capable de diriger un conseil d'administration pour présider celui du Canadien
National. J'ai accepté le poste. Il s'agissait d'une
nomination d'un an qui n'a pas été renouvelée par suite
du change ment de gouvernement à Ottawa.
Certains prétendent que c'est pour cette raison que je me suis présentée aux élections
provinciales. Ce n'est pas vrai. J'étais très insatisfaite de ce qui se passait
en Alberta. Voilà pourquoi je me suis sentie obligée de me présenter.
Ray Speaker : Mon père était militant du Crédit Social. J'avais l'habitude de
l'aider en accompagnant des gens en voiture aux bureaux de vote ou en faisant
d'autres choses du même genre. De 1959 à 1962, j'ai été chef du Crédit Social
sur le campus de l'Université de l'Alberta, où je poursuivais mes études. (Joe
Clark, Grant Notley et Jim Coutts militaient alors pour d'autres partis.)
J'avais fait la connaissance du premier ministre Ernest Manning et, après avoir
obtenu mon diplôme, j'ai travaillé pour lui à la consolidation des associations
de circonscription du sud de la province, en prévision des élections de 1963.
Lorsque le président de l'Assemblée, Peter Dawson, est décédé, j'ai décidé de
poser ma candidature à Little Bow.
Pam Barrett : Je me suis intéressée à la politique pour la première fois à l'âge de
12 ans lorsque j'ai entendu parler à l'école de Tommy Douglas et de
l'assurance-maladie. J'étais convaincue qu'il fallait assurer l'égalité d'accès
aux services, indépendamment de l'aptitude à payer. C'est depuis ce moment-là
que je m'occupe de politique et que j'ai foi dans le mouvement néo-démocrate.
Je me suis beaucoup intéressée aux questions relevant de la compétence
provinciale depuis que j'ai occupé les fonctions de chargée de recherches pour
les néo-démocrates, lorsque nous formions l'opposition officielle. C'est Grant
Notley qui m'a demandé de poser ma candidature. Cela m'a beaucoup encouragée et,
après sa mort, j'ai tenu mon engagement de me présenter aux élections.
Est-ce
qua le rôle de député(e) provincial(e) correspondait à vos attentes?
Bettie Hewes : C'était très différent du conseil municipal où chacun n'agissait qu'en
son propre nom. À l'Assemblée, il y a une équipe gouvernementale et des équipes
d'opposition.
Il y a une autre différence qui découle du fait qu'en se présentant aux élections, on
parle de ce qu'on fera comme membre du gouvernement et non comme membre de
l'opposition. Dans l'opposition, on ne peut pas gagner. On participe à des
débats, on dialogue avec le gouvernement, mais on sait qu'on ne vaincra pas.
Quand on se fait le champion d'une cause à laquelle on
croit, il faut choisir entre une attitude partisane permettant de remporter des
avantages politiques et un dialogue avec le gouvernement pouvant aboutir à une
solution.
Greg Stevens : Mon expérience n'est pas très représentative puisque j'ai directement
accédé au cabinet. À l'ouverture de la législature, l'opposition s'est immédiatement
attaquée aux nouveaux membres du cabinet. Le premier
ministre avait fait des voyages à Hawaii et, à titre de ministre responsable du
personnel provincial, je devais répondre aux questions relatives aux déplacements et aux conflits d'intérêts. J'avais bien
reçu des conseils du bureau du greffier, de collègues et du cabinet du premier
ministre, mais, à la Chambre, il faut faire face tout seul.
Même les choses les plus simples ne sont pas très claires pour le néophyte. Un jour, un
collègue m'a fait passer une note me suggérant d'attirer l'attention de la
Chambre sur la présence dans la galerie d'un groupe d'écoliers de neuvième
année venant de ma circonscription. Je ne savais pas
comment le faire, alors il m'a rédigé quelques phrases. Pendant que je parlais,
un autre collègue m'a fait passer une autre note disant : Excellent discours,
mais fermez donc votre braguette. Il n'y a pas d'école pour les députés, mais on
apprend petit à petit les ficelles du métier.
Ray Speaker : J'ai toujours pensé que le premier devoir d'un député est
d'apprendre à connaître ses électeurs, leurs problèmes et leurs objectifs
personnels. Je le crois toujours. Les électeurs ont souvent de bonnes idées et
il importe de ne pas les juger d'avance. Nous devons appuyer leurs initiatives et
non contrecarrer leurs projets personnels. Bien sûr,
mes électeurs me donnent le droit de poursuivre mes propres buts relativement
aux nouveaux projets de loi. Cette responsabilité peut être écrasante. Trop de
confiance dans le chef peut nuire beaucoup à la démocratie.
Pam Barrett : Ayant exercé les fonctions de chargée de recherches je
connaissais déjà les facettes du rôle de député. Je devais justement chercher
les renseignements nécessaires pour exercer ce rôle. Les chargés de recherches
agissent souvent comme suppléants de leur député, s'occupant de cas
particuliers et assistant à diverses réunions. La différence entre mes
fonctions de chargée de recherches et mon travail de députée est strictement
une question de temps : avant d'être élue, je ne passais probablement que deux
soirs par semaine et une journée tous les deux week-ends à
faire ce qu'on pourrait appeler des heures supplémentaires. Maintenant, je dois
travailler tous les soirs, sauf peut-être le vendredi, et quelques heures tous les week-ends. Le vendredi soir, je fais une petite cure de
sommeil pour recharger mes batteries. Par conséquent, la différence est non pas
qualitative mais principalement quantitative.
Est-ce
que la période des questions a changé maintenant que l'opposition est plus nombreuse?
Greg Stevens : Oui, 22 députés d'opposition, c'est certainement différent de
quatre ou cinq. Les deux premières questions vont au
chef de l'opposition officielle qui a également droit à trois supplémentaires.
Chacun des autres partis, y compris le parti au pouvoir, a droit à une autre question supplémentaire. Ensuite, le chef du troisième
parti pose une question, qui est encore suivie par trois supplémentaires, plus
une supplémentaire pour chacun des autres partis. Cela revient à dire que pendant
près de 30 minutes, nous ne nous occupons que de trois sujets. C'est
parfois très ennuyeux et c'est souvent frustrant pour un simple député qui
voudrait poser une question sur un sujet différent. On accuse les députés du
gouvernement de poser des questions faciles; cependant,
j'ai souvent des questions difficiles à poser aux ministres, mais je n'arrive
pas à obtenir la parole.
Bettie Hewes : Je n'aime pas beaucoup les dispositions régissant la période des
questions, en dépit du fait qu'elles aient été négociées et aient fait l'objet
d'un accord entre tous les partis au début de la session. Nous n'avons pas
notre tour avant que 10 à 12 questions principales et supplémentaires aient
été posées. Trois supplémentaires c'est un peu trop.
Je trouve aussi que les ministres ont tendance à lire de longues réponses. Le président
les interrompt quelquefois. Il pourrait peut-être le faire plus souvent.
La période des questions est très intéressante parce que c'est la seule partie de
nos délibérations que les médias couvrent bien. Nous devons apprendre à bien
poser nos questions. Si nous posons des questions trop théoriques, leurs
répercussions politiques sont faibles.
Ray Speaker : Je pense que les nouvelles règles qui régissent la période des
questions sont bonnes et équitables et lj félicite le gouvernement et
l'opposition officielle de les avoir adoptées. Elles donnent aux simples
députés la possibilité de poser des questions et d'engager un débat
contradictoire. Cependant, le président nous tient constamment dans les limites
du Règlement. Quand des élections approchent, les questions se concentrent
davantage sur certains sujets et on assiste plus souvent à des attaques
brutales.
Pam Barrett : Les ministres n'aiment pas les
interrogatoires serrés. Ils manipulent sans vergogne la période des questions
en prenant chaque fois six ou sept minutes pour répondre à des questions qu'on
a mis une minute à leur poser. En agissant ainsi, ils trahissent l'esprit du
Règlement de notre Assemblée. Je trouve cela honteux.
À mon avis, le nombre de députés ministériels d'arrière-ban à qui on accorde la
parole pendant la période des questions est particulièrement exagéré.
Souvent, après les questions des chefs de parti, les députés du gouvernement
ont droit à plus de questions que ceux de l'opposition. Ils ont déjà accès aux ministres pendant les réunions de leur caucus et peuvent
apprendre là, à titre exclusif, les raisons motivant les décisions du
gouvernement. C'est pendant ces réunions qu'ils devraient poser leurs questions
et non pendant la période des questions, qui devrait appartenir presque
intégralement à l'opposition.
Je pense que nous comptons parmi les rares assemblées qui permettent à des députés de
tous les partis de poser des questions supplémentaires. Si cette façon de
procéder était justifiée quand l'opposition ne comptait que quelques députés,
c'est une vraie perte de temps maintenant que l'opposition est plus nombreuse,
car elle empêche les députés de passer à de nouveaux sujets. Je crois que nous
devrions réduire le nombre des questions supplémentaires autorisées. À mon
avis, l'auteur d'une question principale devrait avoir droit à deux
supplémentaires, un point, c'est tout. Si un autre député veut reprendre le
même sujet, il pourrait le faire lorsque c'est son tour de parler et il aurait
droit lui aussi à deux questions supplémentaires. Le gouvernement a sans doute
trouvé avantageux que ses députés prennent la parole pour poser aux ministres
de gentilles petites questions supplémentaires, à la suite des questions très
sérieuses posées par l'opposition.
À quel point l'efficacité de l'opposition dépend-elle du nombre de députés qui en font
partie?
Greg Stevens : Je ne crois pas que le nombre ait beaucoup d'importance, c'est la qualité
qui compte. Le grand problème, c'est que l'opposition désigne des députés
particuliers comme critiques d'un certain nombre de ministres. Je ne sais pas
ce que pensent les électeurs lorsque leur député n'aborde que des sujets dans
le domaine qui lui est attribué, tandis qu'ils peuvent eux-mêmes s'intéresser à
un ensemble beaucoup plus vaste de questions. Se sentent-ils bien représentés?
De 1967 à 1971, lorsque l'effectif de l'opposition officielle est passé de six à dix
députés, ils étaient perçus comme faisant bloc ensemble pour constituer
l'opposition loyale de Sa Majesté. Aujourd'hui, avec trois partis politiques d'opposition, le
public voit bien que chacun cherche à
se mettre en vedette. Cette division dans les rangs de l'opposition avantage le
gouvernement. Le nombre a aussi de l'importance parce que, du côté
gouvernemental, nous devons faire beaucoup plus attention. Nous n'avons plus,
en effet, que 34 simples députés chargés de veiller à ce qu'il y ait
toujours un quorum de 20 à la Chambre.
Bettie Hewes : Notre caucus s'est réparti la tâche, et la part de chacun est
évidemment énorme.
En ce qui concerne nos responsabilités en dehors de la Chambre, chaque député doit être
très actif dans sa circonscription. Bien sûr, ce n'est pas facile en session,
puisque chacun des quatre députés doit assister aux séances de la Chambre. Il
est difficile de quitter Edmonton pour se mettre au courant de ce qui se passe
dans le reste de la province et il est pratiquement impossible de s'occuper de
toutes les questions qu'on voudrait. Le temps devient une denrée très rare et
il nous faut constamment choisir entre ce qu'il faut faire et ce qu'il faudrait
faire.
Le nombre a de l'importance en fonction de la visibilité, de la viabilité et de la
vigueur de l'opposition. Avec 22 députés, elle se porte certainement
mieux. Le public se rend davantage compte de son action et peut envisager
sérieusement de la porter au pouvoir aux élections suivantes.
Le premier ministre, et d'autres aussi, ont fait remarquer que le chahut qui se
produit pendant la période des questions ainsi que les débats animés entre les
deux bords nuisent à la dignité traditionnelle de la Chambre qui, dit-on, est
en train de s'abaisser au niveau du Parlement fédéral. Cette situation énerve
un peu le Président puisqu'il n'y avait pratiquement pas de chahut ni
d'échanges vigoureux auparavant. Le chef libéral a beaucoup d'esprit et
d'humour. Cela peut déranger certains, mais j'estime qu'il s'agit là
d'importants échanges humains. Il ne serait pas très positif de chercher à
entraver cette forme de communication ou à interdire l'expression des émotions
à la Chambre. Je ne vois pas pourquoi le débat devrait être constipé. Le rôle
de l'opposition consiste en partie à amener les ministres à perdre pied. Ils
sont alors plus vulnérables, ce qui nous permet parfois de découvrir des choses
particulièrement intéressantes.
Ray Speaker : Bien sûr, le nombre est important. Plus on a de gens, plus on peut
soulever de questions et plus on peut les fouiller. Si on ne peut compter que
sur quatre ou cinq personnes, chacune doit approfondir un trop grand nombre de
sujets et il est très difficile de mettre la main sur tous les faits
importants. Si nous ne pouvons consacrer le temps voulu à une question,
certains de ses aspects peuvent nous échapper. Avec plus de députés,
l'opposition a une meilleure chance d'examiner et d'approfondir les questions
et de tenir le gouvernement responsable de ses actes.
Quand on examine le phénomène Lougheed, on se rend compte qu'il aurait vite été balayé
s'il avait été à la tête des conservateurs dans les années 50. Il s'est trouvé
là dans une période de transition politique, sociale et économique. La nouvelle
génération ne se souvenait plus des racines du Crédit Social et cherchait quelque
chose de plus excitant. C'était une période de violent
bouleversement social. Les gens ne cherchaient plus un chef stable,
conservateur et incarnant une forte tradition religieuse. Il y a eu, au début
des années 70, une petite récession qui a fait peur à tout le monde. Le
gouvernement provincial y a réagi en serrant les cordons de la bourse. Du point
de vue économique, c'était la chose à faire, mais cela n'a pas été très
populaire. Lougheed avait donc trois puissants facteurs qui jouaient à son
avantage.
Nous sommes aujourd'hui dans une nouvelle période de changement social et
économique. Et c'est le changement économique qui se manifeste le plus
violemment. Cela est évident quand on considère l'industrie du pétrole et du
gaz, l'agriculture, les petites entreprises et même les emplois des
particuliers. L'Alberta se trouve encore dans une période de transition qui se
caractérise par l'instabilité politique et les perspectives de changement qui
en découlent. Les électeurs cherchent quelqu'un pour les aider à se sortir de
ce mauvais pas.
Dans le passé, lorsque l'opposition était réduite et que je dirigeais l'opposition officielle, les différents groupes tenaient des réunions
informelles de stratégie. Cela s'est produit en particulier lors du débat sur
le Fonds du patrimoine qui avait duré une nuit entière en 1981. À cette
occasion, Grant Notley (chef du NPD), Tom Sidlinger (indépendant, ancien membre
du caucus conservateur) et moi avions ouvertement travaillé ensemble.
Aujourd'hui, j'hésiterais à le faire. Je ne suis pas socialiste et je voudrais
qu'un gouvernement de droite reprenne le pouvoir en Alberta. Tout appui que j'obtiendrais de la part des néo-démocrates ne ferait que renforcer l'option de
gauche. En fait, les néo-démocrates se sentent assez nombreux maintenant pour
agir seuls.
Pam Barrett : Le nombre n'a d'importance que dans la mesure où il nous permet de
manifester notre présence. La volonté politique de le faire ne dépend pas d'un
grand nombre. De 1982 à 1986, nous avions une opposition officielle de deux
personnes dont l'action a permis l'élection de 16 députés néo-démocrates en
1986. Deux députés ont pu influencer sensiblement les travaux de la Chambre. Je
ne doute donc pas que la qualité prime sur la quantité.
Cette opposition de deux membres envisageait toutes les manœuvres permises par la
procédure parlementaire pour retarder les projets de loi et les motions qu'elle
désapprouvait. Nous passions des heures à préparer des motions de report, des
modifications, des amendements raisonnés, des débats sur la motion à l'étude,
examinant le moindre petit détail afin d'utiliser à notre avantage le maximum
possible du temps de la Chambre. Nous devions connaître tous les méandres de la
procédure parlementaire pour appliquer ce genre de stratégie, et nous avons
réussi. Nous devons également prévoir toutes les décisions que le Président
pouvait prendre. Il nous a fallu, en effet, apprendre à vivre dans les limites
plutôt strictes que le Président nous avait fixées.
La différence entre cette législature et la précédente, c'est que nous ne sommes
plus en mesure à l'heure actuelle de manifester notre présence en dehors de la
période des questions. Nous pouvons maintenant consacrer une bonne partie de
notre temps et de nos efforts au reste de l'ordre du jour de l'Assemblée. Nous
mettons au point une argumentation qu'il nous est possible de reprendre et de
développer régulièrement. Cela nous était pratiquement impossible auparavant
car, pour deux personnes, les occasions de prendre la parole sont assez
réduites.
Comment votre caucus est-il organisé?
Greg Stevens : Au caucus, la principale différence entre Peter Lougheed et Don
Getty, c'est que ce dernier préside presque toutes les réunions pendant presque
toute leur durée, tandis que Lougheed ouvrait les séances puis cédait la
présidence au whip du gouvernement. Don Getty a ainsi l'occasion de prendre
directement connaissance des vues des députés de toute la province. Le whip
aide à déterminer l'ordre dans lequel les orateurs prennent la parole.
En session, le caucus tient des réunions d'une demi-heure tous les
jours, sauf le jeudi où il se réunit pendant toute la matinée. Souvent,
si la Chambre ne siège pas dans la soirée, le caucus
tient une autre réunion. Pendant les intersessions, il se réunit deux journées
complètes par mois, ordinairement le jeudi et le vendredi. L'ordre du jour est
distribué d'avance. Si un député désire exposer une question particulièrement
urgente, il téléphone au Président (le premier ministre) pour faire ajouter la
question à l'ordre du jour.
Les comités du caucus jouent un rôle très important. Il existe un certain nombre de
comités spécialisés : forêts, agriculture, santé et affaires sociales, affaires
économiques, éducation. Chaque député donne une liste des comités dont il
souhaite faire partie, mais on n'en tient pas nécessairement compte. Beaucoup
de députés se demandent pourquoi ils sont membres de tel ou tel comité. Quoi
qu'il en soit, les comités entendent les ministres compétents et divers groupes
d'intérêts concernés pare sujet discuté. Chaque projet de loi doit être examiné
par un comité et a peu de chances d'être adopté s'il ne bénéficie pas de
l'appui de ce dernier. Des projets de loi ont été abandonnés ou complètement
refaits à cause de l'opposition d'un comité ou de critiques de la part de ses
membres. De chaudes batailles sont livrées dans ces comités; c'est là que les
députés ont vraiment leur mot à dire.
Bettie Hewes : Le caucus libéral se réunit tous les jours à 11 heures pour discuter
des activités du jour avec les deux chargés de recherches principaux et le
directeur des communications. Nous devons être vigilants et au courant des
questions qui peuvent être soulevées dans la journée. Nous prévoyons également
les grands thèmes de la période des questions et considérons le sujet probable
des deux premières questions, qui appartiennent à l'opposition officielle.
Pendant les intersessions, nous essayons de nous retrouver une fois par semaine, ce qui
est souvent difficile puisque nos députés sont très actifs dans leur
circonscription. Nous organisons d'importantes réunions hors de la capitale,
tant dans le nord que dans le sud de la province. L'année dernière, nous avons
convoqué des réunions de caucus à Grande Prairie et à Lethbridge pour discuter
des préoccupations locales et régionales.
Ray Speaker : Lorsque le Crédit Social était au pouvoir, le premier ministre et le
cabinet détenaient tant de responsabilités que les simples députés n'avaient
pas souvent l'occasion de proposer des projets de loi ou de nouvelles idées.
Quand Harry Strom est devenu premier ministre, il a demandé des idées sur la
façon de renforcer le rôle des simples députés. Bien qu'un comité se soit
occupé de la question, il n'a formulé aucune recommandation importante.
En tant que petit parti
d'opposition, puisque nous ne sommes que deux à l'assemblée,
nous avons à l'origine cherché à nous occuper de tous les problèmes que les
gens nous transmettaient et qui pouvaient relever de n'importe quel ministère.
Nos efforts se sont donc éparpillés. Notre personnel de recherche se lançait
dans de grands projets dont nous ne pouvions pas utiliser les résultats.
Nous avons maintenant décidé de nous limiter à trois sujets précis pour chaque
ministère. Souvent, nous ne pouvons étudier en profondeur que deux de ces
sujets, mais nous le faisons avec beaucoup de soin, d'une façon aussi détaillée
que possible. Nous sommes donc mieux préparés pour répondre à des questions
précises. Je pense que c'est plus efficace ainsi.
Pam Barrett : Notre caucus a un comité de planification stratégique comprenant le
chef du parti, le leader parlementaire, le whip, le président du caucus
d'Edmonton, le président du caucus et un autre membre élu par ses collègues. Le
comité se réunit tous les jours pour établir la stratégie de la journée.
L'ensemble du caucus se réunit ensuite pour prendre connaissance des
recommandations du comité, qui sont alors approuvées ou modifiées. De plus, le
caucus se réunit une fois par semaine pendant une demi-journée, pour discuter
non de stratégie mais de problèmes précis. Cette réunion revêt un caractère
extrêmement politique : chaque député y expose ses principes et sa façon de
voir les choses. Bien entendu, comme nous souscrivons tous à la philosophie
néo-démocrate de base, ces réunions se caractérisent bien plus par la cohésion
que par les divisions qui peuvent s'y manifester.
Au début des intersessions, le caucus se réunit une fois toutes les deux semaines. Un
peu plus tard, nous passons à une fois toutes les trois semaines puis, à mesure
que la reprise approche, nous revenons à une réunion par quinzaine.
Pensez-vous
qu'il y aura un transfert de pouvoirs entre les comités du caucus
gouvernemental et les comités de l'Assemblée?
Greg Stevens : L'opposition ne semble pas exercer des pressions pour avoir des
comités à orientation politique. Les libéraux
voulaient simplement que le comité des comptes publics siège pendant les
intersessions de l’Assemblée. Cela n'a pas été possible parce qu'il ne
disposait pas des fonds nécessaires.
Le comité des services aux députés a beaucoup de latitude et agit dans l'intérêt des
députés, en respectant bien sûr les lignes directrices établies. Les
recommandations du comité du Fonds du patrimoine sont écoutées et peuvent
influencer les décisions du gouvernement. Des comités spéciaux ont également
été formés de temps en temps pour s'occuper de questions telles que les
accidents de travail, la Constitution, la réforme du Sénat, etc.
Bettie Hewes : Les comités de l'Assemblée fonctionnent tous relativement bien. Bien
sûr, ils sont essentiellement composés de députés ministériels qui ont tendance
à appuyer le gouvernement. Il y a de bons échanges entre les députés pendant
l'étude des questions qui leur sont soumises. C'est le comité des services aux
députés qui est le plus susceptible d'avoir des difficultés.
Nous avons un comité spécial qui étudie les accidents de travail à
peu près tous les quatre ans. Je ne crois pas qu'il soit très efficace. Ses
membres n'adoptent pas une position indépendante et ne disposent que de l'avis
des experts du ministère. Je préférerais qu'un comité de citoyens étudie la
question de divers points de vue.
Ray Speaker : Le seul comité qui semble avoir pris de l'importance est celui des
services aux députés. Le transfert de pouvoirs entre le caucus conservateur et les
comités de l'Assemblée ne se produira que si le public exerce des pressions
politiques sur les députés. À mesure que l'opposition se renforce et représente
un danger croissant, le gouvernement hésite de plus en plus à
forcer les décisions de son caucus. L'Assemblée peut assumer un plus grand rôle
décisionnel et contribuer davantage à améliorer les choses. Je crois que la
situation va continuer à évoluer dans un sens positif à mesure que se rapproche
la date des prochaines élections.
Pam Barrett : Rien n'indique qu'on veuille rendre les comités législatifs plus
efficaces. Sous Lougheed, certains comités, comme celui des accidents de
travail, étaient constitués pour siéger pendant toute la durée d'une
législature. Aujourd'hui, le gouvernement ne forme que des comités internes qui
travaillent d'une manière très partisane. C'est le cas du comité d'examen des
établissements médicaux qui est présidé par un député du gouvernement et qui se
compose d'autres députés conservateurs ainsi que de citoyens choisis par le
ministre. Bien entendu, les députés de l'opposition n'y ont pas accès. Cette
façon d'agir affaiblit l'Assemblée législative et confère des pouvoirs excessifs
au caucus du gouvernement. Getty craint les comités où tous les partis sont
représentés parce que les questions qui leur sont soumises font l'objet d'un
débat et d'un examen publics que le gouvernement préfère éviter. Lougheed avait
une attitude beaucoup plus constructive à cet égard. Il reconnaissait
l'importance de l'opposition à l'Assemblée et ne prenait pas de mesures
extraordinaires pour exclure les députés de l'opposition du processus
décisionnel.
Trouvez-vous
satisfaisantes les modalités d'examen du budget des dépenses?
Greg Stevens : En 1986, le système d'examen du budget des dépenses a été modifié par
l'actuel chef de l'opposition. Je crois qu'il a alors rendu un bien mauvais
service à la population de l'Alberta.
Auparavant, les ministres étaient soumis à un interrogatoire serré au sujet de chaque
rubrique de leur budget. Des fonctionnaires étaient installés dans la galerie
pour les aider s'ils avaient besoin de faits ou de chiffres. Souvent, ils ne
pouvaient répondre à toutes les questions et devaient revenir pour le faire.
Aujourd'hui, les députés de l'opposition profitent simplement au maximum de la règle qui
leur permet de parler pendant 30 minutes. Par conséquent, des discours
d'une demi-heure ont remplacé les dures questions du passé. De chaque côté, on
parle 30 minutes. Les ministres ne sont plus soumis à aucune pression et
l'opposition noircit des pages de hansard.
Bettie Hewes : Je suis très mécontente du système d'examen du budget des dépenses à
l'Assemblée. Tout d'abord, les chiffres donnés à la Chambre ne révèlent pas
grand-chose. Il est difficile pour un député de l'opposition d'imaginer ce
qu'ils signifient exactement car les explications qu'on nous donne sont très
limitées. Nous ne disposons ni du coût particulier de chaque rubrique, ni de
chiffres comparatifs pour les années précédentes, ni de projections pour
l'avenir. Le contribuable en a-t-il pour son argent? Ses impôts servent-ils à
acheter ce dont il a besoin ou ce qu'il désire obtenir? Les dépenses ont-elles
permis d'atteindre le but visé? On ne nous fournit que des totaux pratiquement
sans explication.
L'Assemblée dispose de 25 jours de séance pour examiner les budgets de 25 ministères et
d'un certain nombre d'autres organismes. Cela revient à dire que nous disposons
en pratique de deux heures et demie pour étudier chaque ministère. Le ministre
commence par nous servir 30 minutes de grandes généralités. Il est suivi
par le critique de l'opposition officielle qui fait un autre discours de 30
minutes supplémentaires pour répondre. Le temps file à toute allure. Les
modalités actuelles ne permettent pas d'étudier le budget en détail et
d'interroger à fond le ministre. Il n y a aucun moyen de parler aux
fonctionnaires du ministère.
Ray Speaker : Le problème des débats sur le budget et sur les prévisions de dépenses,
c'est qu'ils sont très éparpillés. La durée des discours étant fixée à 30
minutes, il n y a pas d'échanges contradictoires rapides. Les questions et les
réponses manquent de profondeur et de précision.
Le comité plénier peut être très efficace, mais ce n'est pas le
cas à présent. Lorsque de nombreux députés veulent parler chacun pendant 30
minutes, le débat ne peut porter sur des points précis, ce qui lui enlève
l'intensité qu'il avait auparavant.
À un certain moment, nous avons essayé d'examiner le budget des dépenses en
sous-comité. Je n'ai pas beaucoup aimé l'expérience. Souvent, nous devions
tenir le crachoir au sous-ministre qui parlait encore plus longtemps que le
ministre. Pour moi, tout cela n'est qu'une perte de temps. Il faut que le débat
se déroule dans une arène publique car c'est alors seulement qu'il y a une
chance d'influencer quelque peu le gouvernement.
Pam Barrett : De tout temps, le comité plénier a eu le mandat de débattre le budget
des dépenses, les projets de loi et les motions à un niveau très détaillé. Il
n'est plus efficace aujourd'hui. Il est crucial former que le comité plénier
soit autorisé à former des sous-comités chargés de certaines questions, de
certaines rubriques budgétaires, de certains projets de loi et de certaines
motions.
La présente législature a été marquée par des combats de procédure. Par
conséquent, les débats ont davantage porté sur des problèmes politiques que sur
des questions détaillées comme les rubriques du budget des dépenses. Lorsque
l'opposition ne comprenait que deux députés néo-démocrates, il lui était
possible à la fois de soulever certaines observations politiques générales et
de poser des questions très détaillées. Sachant qu'il ne courait aucun danger
d'ordre politique, le ministre répondait tant aux observations qu'aux
questions. Le débat pouvait alors se poursuivre sans problèmes pendant toute
une soirée. En présence d'une opposition plus nombreuse, le gouvernement a
maintenant une mentalité d'assiégé. Il retarde lui-même l'adoption de son
propre budget. Tout d'abord, on n'accorde souvent même pas deux heures à
l'examen du budget d'un ministère. Aux termes du Règlement, un ministre peut
prendre jusqu'à 30 minutes pour présenter son budget, puis 30 autres
minutes pour répondre à tout autre orateur. Les ministres profitent de plus en
plus de cette disposition pour empêcher les députés de l'opposition de prendre
la parole et d'aborder les détails du budget. Les députés d'arrière-ban du
gouvernement jouent également le même jeu en prononçant eux aussi des discours
de 30 minutes. Comme l'opposition ne peut espérer avoir plus d'un orateur
au cours du débat sur le budget d'un ministère, elle doit essayer d'abordé
tous les points politiques et quelques points financiers
dans le cadre d'un exposé d'une demi-heure. Il est impossible de le faire en
détail ou de parler de crédits particuliers. J'estime que le gouvernement porte
la pleine responsabilité de cette situation. Je crois qu'il trahit et l'esprit
et l'intention du Règlement.
Êtes-vous satisfait(e) des comptes rendus que la presse donne des délibérations de
l'Assemblée?
Greg Stevens : J'ai toujours été intrigué par le fait que certains journaux, comme
le Calgary Herald, couvrent mieux les travaux de l'Assemblée que l'Edmonton
Journal. Les deux ont les mêmes propriétaires et le second affecte plus de
personnel à l'Assemblée. J'ai l’impression que le journal se prend toujours
pour l'opposition officielle.
En ce qui concerne la télévision je suis encore très étonné de constater à quel point l'auditoire de la
période des questions est nombreux. On m'en parle très souvent.
Bettie Hewes : Je n'ai pas vraiment à me plaindre des médias, sauf qu'ils semblent
souvent s'intéresser aux néo-démocrates bien plus que je ne l'aurais voulu.
Peut-être faudrait-il que nous soyons plus habiles en leur fournissant des
informations.
En ce qui concerne la télévision, je suis impressionnée par le nombre des
téléspectateurs, à en juger par ceux qui viennent me voir pour me dire qu'ils
m'ont vue à la télé.
Il y a plus important, comme j'ai pu le constater au conseil municipal : la télévision
permet aux gens de constater que les politiciens sont des êtres humains qu'on
peut approcher. Elle peut également à mon avis, intensifier la participation
des citoyens au processus politique en les renseignant davantage et en leur
montrant qu'un député élu est une personne comme les autres et que chacun peut
aspirer à une fonction élective.
Ray Speaker : De 1971 à 1980, il y a eu une véritable idylle entre Peter Lougheed
et la presse, une idylle qui se poursuit dans une certaine mesure jusqu'à présent. Les questions de l'opposition passent encore très
souvent inaperçues, ce qui n'est pas le cas des réponses du gouvernement.
Les choses vont mieux à la télévision. J'aimerais personnellement que la diffusion des délibérations aille au-delà de la période des questions et qu'elle s'étende
à l'ensemble de la province. Je suppose cependant qu'il faut tenir compte de
diverses considérations de coûts.
La presse cherche toujours à ramener les choses à une simple question de politique de
droite ou de gauche. Le gouvernement actuel est à droite, les néo-démocrates ou
les libéraux sont à gauche et on a tendance à nous ignorer. Il n'y a plus de
journalistes bien pensants...
Pam Barrett : Les médias s'intéressent beaucoup à l'Assemblée pendant les premières
semaines d'une session. C'est en effet à ce moment que les questions les plus
controversées sont soulevées et que le gouvernement présente son programme
politique dans le discours du Trône, son budget et ses nouveaux projets de loi.
Cela est particulièrement vrai dans le cas de la presse électronique, la presse
écrite publiant beaucoup plus régulièrement des articles sir les travaux
quotidiens de l'Assemblée.
Cette session, les comptes rendus ne se distinguent que par le fait qu'ils portent sur un plus
grand nombre de partis. Il y a aussi une autre différence : en 1982, parce que
l'opposition n'avait fait élire que deux députés, l'ancien éditeur de
l'Edmonton Journal avait déclaré que son journal assumerait le rôle de
l'opposition pour aider Grant Notley et Ray Martin. Le journal n'a plus la même
priorité. Cependant, une certaine concurrence s'exerce entre les médias et
l'opposition officielle pour voir qui serait le premier à annoncer les
nouvelles concernant le gouvernement. Cela est très sain. Beaucoup de bonnes
nouvelles peuvent découler de ce genre de concurrence.
Quels changements voudriez-vous voir dans les services, les commodités et
l'administration de l'Assemblée législative de l'Alberta?
Greg Stevens : Je préférerais des sessions législatives courtes et denses. Nous
pouvons beaucoup mieux faire, comme gouvernement, au niveau des
circonscriptions. Ce n'est pas vraiment une critique, mais il faut dire que ce
qui se passe à l'Assemblée n'a pas grand-chose à voir
avec la vie de tous les jours de la plupart des Albertains. Les gens me
demandent quand nous siégeons. On m'a même demandé quand j'étais revenu
d'Ottawa.
Je voudrais également qu'on trouve un nouveau moyen de voter à la Chambre. Nous
perdons trop de temps à attendre la sonnerie qu'on fait retentir pendant huit
minutes pour convoquer les députés au vote. Un dispositif de vote électronique
pourrait accélérer les choses. Je voudrais aussi voir des changements dans la
façon dont les délibérations sont télévisées. À l'heure actuelle, les caméras
sont installées sur une plate-forme et il y a des accidents à l'occasion. Je
préférerais un système plus automatique, comme celui de la Saskatchewan.
J'aimerais également voir installer un système moderne de communications
informatiques qui mettrait instantanément à notre portée tous les
renseignements dont nous avons besoin. Je fais actuellement partie d'un
sous-comité du comité des services aux députés, qui examine les possibilités de
changement dans ce domaine.
Bettie Hewes : Je voudrais qu'on prolonge la période pendant laquelle nos
délibérations sont télévisées. Il faudrait surtout l'étendre à l'examen du
budget des dépenses qui, à mon avis, revêt une importance capitale. Nos débats
devraient être plus animés. Je propose que la durée des discours soit ramenée
de 30 à15 minutes et que les ministres disposent d'autant pour
répondre. Il importe de faire porter les débats sur un plus grand nombre de
sujets.
Pour atteindre cet objectif, il faudra nécessairement prolonger les sessions de l'Assemblée;
nous devrions avoir tant des sessions de printemps que des sessions d'automne.
Cela ne conviendra peut-être pas au gouvernement, mais avec une opposition plus
nombreuse, nous avons besoin de plus de temps pour examiner à fond les
activités de l'administration. Je suis consternée par le
nombre de décisions que le gouvernement prend pendant les intersessions de l’Assemblée.
Ainsi, la politique actuelle de l'énergie et les importantes compressions
faites dans la fonction publique provinciale ont été décidées durant la longue
période d'intersession, apparemment sans consulter personne. Certaines
décisions semblent être reportées en attendant la prorogation de l'Assemblée.
Ce mode de gouvernement basé sur le secret et la concentration des pouvoirs
n'est pas très acceptable. L'Assemblée devrait disposer de plus de moyens pour
tenir le gouvernement responsable de ses actes.
Pam Barrett : Nous vivons vraiment à l'ère de l'information; tout est plus détaillé. Les
politiciens, qui sont les décideurs, doivent consacrer une plus grande part de
leur temps à se mettre au courant des détails, à les examiner soigneusement et
à prendre les décisions nécessaires. Au cours de la campagne au leadership de
son parti, Don Getty a proposé de supprimer la session d'automne. Ce serait
inacceptable. Nous avons besoin au minimum d'une session d'été et d'une autre
d'automne à l'Assemblée législative de l'Alberta. Les Albertains dépensent
beaucoup pour avoir des députés provinciaux. Ils méritent d'en avoir pour leur
argent.
La plus grande part du budget de l'Assemblée législative devrait servir à soutenir la
démocratie et à la mettre à la portée de tous. Notre budget actuel est de 16
millions de dollars, à comparer à un budget provincial de 10,5 milliards. Les
députés du gouvernement qui font partie du comité des services aux députés ont
décidé d'imposer à l'opposition officielle une réduction de 18 p. 100 de son
budget de fonctionnement tandis que l'ensemble du budget provincial ne
subissait qu'une baisse très modeste. Cette coupure a réduit notre aptitude à
assumer nos responsabilités publiques. Nous avons maintenant des bureaux
extrêmement occupés qui ne peuvent répondre à tous les appels téléphoniques, à
tout le courrier, à toutes les demandes de recherches. De même, les députés du
gouvernement se sont attaqués à ce que j'appelle la composante intellectuelle
des services administratifs de l'Assemblée législative : la bibliothèque, les
services de recherche et les stagiaires parlementaires. Cette composante a
souffert indûment de lourdes compressions, sous prétexte des restrictions
budgétaires. Si le gouvernement veut sérieusement imposer des restrictions, il
devrait le faire uniformément. D'importantes coupures effectuées sur de tout
petits budgets sont extrêmement injustes et malavisées. Elles limitent
l'aptitude de la Chambre à surveiller l’activité
du gouvernement en réduisant des ressources d'information sans lesquelles
l'Assemblée ne peut s'acquitter de ses fonctions. Le gouvernement a adopté une
mentalité d'assiégé : craignant l'opposition et l'information, il manifeste des
tendances anti-information et anti-intellectuelles.
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