John Bosley
Déclaration du Président de la Chambre des communes
concernant la période des questions, M. John Bosley, le 24 février
1986.
Contexte : Les nouveaux Présidents sont généralement
mis à rude épreuve par les députés de tous les partis qui veulent voir jusqu'où
ils peuvent aller dans les limites du Règlement. Depuis que les débats sont
télévisés, les députés, les médias et le public ont pu remarquer les moindres
erreurs commises. C'est pourquoi, un an après avoir été nommé Présidentde la
Chambre, et en réponse aux critiques qui lui ont été faites sur la conduite de la
période des questions, M. John Bosley a exposé aux députés de la Chambre des
communes ce qu'il croit être les principes fondamentaux de la période des
questions.
Décision du Président John Bosley
: Onze années se sont écoulées depuis que le PrésidentJerome a fait une
déclaration de ce genre. À l'époque, nos débats n'étaient pas télévisés. La
télévision a eu une grande influence sur le comportement des parlementaires et
sur la façon dont le public perçoit les députés et les usages du
Parlement.
Les lignes directrices habituellement suivies pour les
questions écrites et orales, figurent aux commentaires 356 à 371 de la 5e
édition de Beauchesne. Elles sont également résumées aux pages 25 et 26 du
Précis de procédure que le service de recherche du greffier a récemment préparé
et distribué à tous les députés. Certaines d'entre elles demeurent valides, mais
d'autres sont périmées. La Chambre établit elle-même sa procédure et la
présidence ne peut la faire appliquer que si elle est conforme aux désirs de la
Chambre.
Pour que la période des questions fonctionne bien, elle doit
se dérouler dans les formes, selon certaines règles. Comme vous vous en doutez,
plusieurs arguments ont été présentés à cet égard.
Certains souhaitent le rétablissement intégral de l'ancien
règlement, même s'il n'a pas été appliqué depuis des années, tandis que d'autres
estiment que la présidence devrait se soucier uniquement de la longueur et de la
formulation des questions et, pour le reste, laisser les députés utiliser leur
temps de parole à leur guise, dans la mesure où le public le jugera
acceptable.
Certains ont même poussé cet argument jusqu'à dire qu'il
faudrait autoriser les députés à utiliser cette période pour faire des
déclarations plutôt que pour poser des questions, s'ils le désirent, et à
employer le langage de leur choix, même s'il est antiparlementaire. Si cela ne
plaît pas à leurs électeurs, ils le leur feront savoir.
Il me semble pratiquement impossible de rétablir entièrement
le règlement qui interdit, par exemple, de questionner un ministre sur un sujet
dont les médias ont parlé ou sur une déclaration faite à l'extérieur de la
Chambre, ou encore de poser certaines questions concernant la politique
gouvernementale. Il ne serait pas non plus logique de le faire, quoi qu'en
pensent certains chroniqueurs.
D'un autre côté, même si la longueur et la formulation des
questions posent un problème bien réel ' la présidence ne peut pas s'en tenir à
ces considérations. La période des questions est à la disposition de l'ensemble
de la Chambre et même d'un auditoire encore plus vaste. Cela peut avoir
certaines conséquences politiques et, en tout cas, la Chambre doit veiller
collectivement à sauvegarder son image et sa réputation et faire en sorte que
l'utilité du Parlement ne soit pas ainsi mise en doute. La Chambre en général n'a pas
intérêt à ce que la période des questions s'éloigne de sa formule originale pour
devenir seulement une période où les députés peuvent donner libre cours à leur
esprit sectaire.
Il me semble par conséquent que les règles relatives à la
période des questions devraient se fonder sur les principes suivants :
Premièrement, le temps est précieux et il faut par
conséquent qu'il soit utilise au mieux par le plus grand nombre possible de
députés.
Deuxièmement, beaucoup de citoyens suivent la période des
questions à la télévision et du fait que cette période donne souvent lieu à des
échanges animés, la Chambre devrait se montrer sous son meilleur jour.
Troisièmement, si les députés qui participent à la période
des questions peuvent avoir d'autres visées et d'autres ambitions, l'objectif
principal doit être de demander des renseignements au gouvernement et de
l'amener à rendre compte de ses actes.
Quatrièmement, les députés doivent pouvoir poser des
questions le plus librement possible, ce qui concorde
avec les autres principes, ou comme l'a si bien dit le PrésidentJerome, il faut
essayer de réduire au minimum les obstacles qui risquent de restreindre le droit
du député de poser des questions.
Dans la déclaration qu'il a faite il y a onze ans, le
PrésidentJerome a très bien exposé le principe de la brièveté; je me
contenterai donc de le citer : « Il ne fait absolument aucun doute que le pire ennemi de la
période des questions est le député qui ne respecte pas ce principe capital. Le
député qui' pose une question sur un sujet quelconque a peut-être besoin d'une
explication, mais il n'a aucune raison de faire un préambule dépassant les
limites d'une phrase. Je me propose
de demander à tous les députés d'y faire très attention et je les rappellerai
a l'ordre s'ils ne le font pas. Je répète qu’un long
préambule ou une longue question fait perdre beaucoup de temps; le fait que cela
provoque invariablement le même genre de réaction ne fait qu'augmenter la
difficulté ».
Je suis d'accord sur ce point et
j'ajouterais que cela s'applique également aux réponses des ministres. À
l'instar du PrésidentJerome, je trouve que les questions supplémentaires ne
nécessitent pas de préambule, elles devraient découler de la réponse du ministre
et elles ne devraient pas être précédées d'une déclaration ou d'un argument;
elles devraient être précises et directes. Le temps étant précieux, la
présidence estime que les députés devraient essayer d'éviter de répéter purement
et simplement des questions qui ont déjà été posées. Je
ne veux pas dire, comme certains semblent l'avoir compris, que l'on ne doit pas poser d'autres
questions sur le même sujet, mais que les questions suivantes doivent être
différentes de celles qui ont déjà été posées.
Pour les mêmes raisons, les questions posées aux ministres
doivent respecter une règle fondamentale, à savoir que leur objet doit tomber
sous la compétence globale du gouvernement ou la compétence particulière de l'un
de ses ministres. C'est le seul critère en vertu duquel les ministres doivent
répondre aux questions.
Mises à part ces quelques restrictions, certaines autres
conditions découlent depuis toujours des principes ci-dessus. Les questions
doivent porter sur des affaires urgentes et ne pas être purement hypothétiques.
Elles ne doivent pas viser à obtenir une opinion juridique ou à déterminer quel
conseil juridique un ministre a obtenu. Elles ne doivent pas normalement
anticiper sur l'ordre du jour. Cependant, je me hâte d'ajouter qu'il y a
généralement une exception à cette règle pour l'exposé budgétaire, et que j'ai
l'intention de la respecter. Les députés doivent prendre garde à ne pas poser de
questions sur des affaires en instance. Il faut interroger les ministres
uniquement dans des domaines en rapport avec leur portefeuille actuel et non
avec les responsabilités qu'ils détenaient auparavant au cabinet ou au sein de
leur parti.
Enfin, je rappelle à tous les députés les commentaires de
Beauchesne et les articles de notre Règlement sur le décorum et le langage
utilisé à la Chambre. J'ai l'impression (et, à en juger par le courrier que je
reçois, que nombre de nos électeurs sont de cet avis) que la tenue et le langage
des députés ne sont pas conformes à ces commentaires tout à fait raisonnables et
que nous ne donnons pas l'image de personnes respectables. Les interjections et
les pointes politiques font partie de notre tradition, mais pas les
plaisanteries de corps de garde ni les insultes personnelles.
J'ai l'intention d'être aussi sévère que possible et
d'interrompre les députés ou les ministres qui ne respectent pas nos usages;
mais la présidence ne peut pas faire grand chose pour empêcher les échanges de
bas étage entre les députés de tous les partis, si ce n'est inviter tous les
députés à comprendre que ce comportement donne une très mauvaise impression du
Parlement lui-même et leur demander à nouveau de ne pas oublier qui nous sommes.
Cependant, il est possible que la présidence soit gênée par un bruit excessif et
qu'il lui soit difficile de voir les députés qui demandent la parole.
Comme toujours, je compte sur la collaboration de la Chambre
pour toutes ces questions.
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