Michael Ferr
So Very Near: The Political Memoirs of the Honourable Donald M.
Fleming; tome un : The Rising Years, tome deux : The Summit Years, McClelland and Stewart, Toronto.
L'honorable Donald Fleming a fait une contribution
importante au Canada en se dévouant sincèrement à la chose publique. Il a
commencé sa vie politique comme conseiller municipal pour s'élever jusqu'au
rang de ministre du gouvernement Diefenbaker où il a siégé plus longtemps que
quiconque. À trois reprises, il a posé sa candidature au leadership du Parti
progressiste conservateur, mais sans succès, d'où le titre So Very Near (il
s'en est fallu de peu).
Dans le premier tome, The Rising Years, Fleming
raconte au lecteur sa tendre enfance, expose en détail ses rivalités avec ses
camarades de la faculté de droit, recrée de nombreux débats auxquels il a pris
part au conseil municipal de Toronto et, enfin, cite de longs extraits du
Hansard pour expliquer le travail qu'il a accompli en tant que membre de
l'opposition et, plus tard, en tant que ministre du cabinet du gouvernement
minoritaire de 1957-1958.
Dans le second tome, The Summit Years, il recourt
essentiellement aux archives publiques et relate en 645 pages, avec la plus
parfaite exactitude et un profond respect des détails, les cinq années qu'il a
passées au Cabinet. Son épilogue, qui compte seulement 99 pages nous raconte
les péripéties de sa dernière candidature au leadership et décrit les activités
auxquelles il s'est consacré après avoir quitté le Parlement.
Les historiens se sont toujours montrés sceptiques à
l'égard des mémoires de politiciens, et avec raison. Les mémoires sont souvent
rédigés à partir de souvenirs personnels au détriment de la réalité et l'auteur
y trouve un moyen de se justifier plutôt que de présenter des arguments
solides; en outre, vue leur nature contemporaine, les mémoires nous éclairent
moins sur une époque que sur le caractère de l'auteur.
Il est évident, à la lecture de l'introduction, que
Fleming s'attendait à ce genre de critique. Sa recherche est très exhaustive et
ses arguments sont dignes de son bon sens. Malheureusement, pour l'historien
auprès duquel M. Fleming semble vouloir se justifier d'écrire ses propres
mémoires, Fleming ne donne pas suffisamment de renseignements sur la période
qu'il décrit.
Le style des plus imparfaits est en partie dû à
l'ardeur que met l'auteur à rapporter des faits historiques avec exactitude.
Avocat de profession, l'attention qu'accorde l'ancien ministre à de menus
détails, donne à entendre qu'il a raté sa vocation de comptable. De la première
à la dernière page, Fleming rapporte minutieusement les résultats de votes sans
importance à la Chambre des communes et expose implacablement les montants
affectés à de nombreux grands projets gouvernementaux. N'importe quel éditeur
d'un ouvrage historique sur le monde des affaires aurait recommandé à l'auteur
de reléguer des renseignements pareils au bas des pages. Dans des mémoires de
nature politique, il aurait mieux valu expurger ces détails au profit de la
concision apparemment oubliée.
Une autre grande faiblesse du texte découle de la très
ennuyeuse habitude qu'a Fleming de nommer les nombreuses personnes à qui il se
croit redevable. Il mentionne avec une cérémonieuse précision tous ceux qui ont
exercé une influence sur sa carrière, qui l'ont entouré
ou qu'il a rencontrés au fil des ans.
Dans une autobiographie, il est normal qu'à un moment
donné l'auteur présente d'illustres inconnus qu'il croit devoir remercier. Mais
dans The Rising Years, la continuité du récit est interrompue par la tentative
de l'auteur d'ajouter un autre nom à la liste.
Durant toute sa vie publique, Donald Fleming a fait
preuve d'honnêteté, d'équité et d'acharnement. Pour se décrire, il fait ,observer dans le premier tome :
« J'ai toujours évité
l'alcool, le tabac, le thé, ,et le café sous quelque forme que se soit. Je
faisais attention à ce que je mangeais, tant du point de vue de la qualité que
de la quantité. Je me rendais d'un endroit à l'autre à pied lorsque le temps et
les distances me le permettaient. Je faisais tous les jours des exercices de
gymnastique que j'avais appris quand j'étais enfant au YMCA, à Galt. » Aussi
admirables et louables que soient ces traits de caractère, ils ne se prêtent
pas bien à une autobiographie excitante.
De nombreux hommes d'État se sont racontés, à leur
avantage, sur un ton d'humilité humoristique. N'importe quelle forme d'esprit
aurait certainement rendu plus agréable la lecture des 1 335q pages que constituent ces mémoires.
Au Canada, la popularité des mémoires politiques est
plutôt fondée sur le statut de l'auteur plutôt que sur la clarté de son style
ou sur sa grande compréhension des faits historiques. Quoi qu'il en soit, la
prose problématique et le contenu douteux de cet ouvrage risquent de réduire le
nombre de lecteurs qu'aurait dû captiver un personnage autrefois si aimé.
Michael Ferr
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