George Kerr
Sixième colloque
parlementaire régional canadien, association parlementaire du Commonwealth,
Ottawa, du 2 au 6 novembre 1980,137 p.
Au cours des six dernières années, le colloque parlementaire régional
canadien a permis aux législateurs de comparer et d'évaluer leurs institutions
et leurs procédures. Toutefois, ces débats passent inaperçus aux veux du public
en général, et ils ne sont pas toujours appréciés par la majorité des
politiciens qui n'y participent pas mais qui en profitent pourtant par la
suite.
L'ordre du jour du colloque de 1980 portait sur plusieurs questions que
connaissent bien ceux qui s'efforcent de faire que le représentant élu soit
aussi efficace que possible dans son travail: "Conceptions du rôle d'un
parlementaire", "Le parlementaire et les médias", "Le
député et sa circonscription", etc.
Le compte rendu des délibérations n'est pas ce qu'il y a de plus
intéressant à lire et ne constitue pas un document facile à évaluer. Certes,
les textes ne peuvent refléter l'atmosphère des exposés et des débats et,
évidemment, le procès-verbal du colloque ne tient aucunement compte des
conversations peut-être plus importantes qui ont eu lieu pendant les déjeuners
et les pauses-café.
Il est toutefois évident que le caractère litigieux dle
plusieurs sujets a parfois porté les participants à exprimer très ouvertement
leurs sentiments. Ceci apparaît nettement dans le compte rendu, en particulier
lors de la séance sur le parlementaire et les médias. Fait surprenant, vu la
nature du colloque et les buts de ces séances, les échanges entre participants
et journalistes ont été très animés, mais n'ont pas jeté beaucoup de lumière.
Il était malheureusement évident que l'impertinence des journalistes -- à
l'exception de W.R. Wilson --égalait l'insolence de plusieurs participants. (On
ne sait d'ailleurs pas pourquoi il n'y avait pas de journalistes de la radio et
de la télévision). Si l'on peut faire de sérieuses critiques aux médias sur la
façon dont ils traitent de la politique et des hommes politiques, ce n'est pas
en leur reprochant constamment de ne pas avoir rapporte exactement les paroles
de quelqu'un qu'on les incitera à effectuer un meilleur travail.
Pour ce qui est des vieux sujets de discussion, tels que "Conceptions
du rôle d'un parlementaire", Le parlementaire en qualité de législateur"
et "Comment améliorer l'efficacité du parlementai", ceux qui tiennent
les cordons de la bourse devraient avoir compris depuis longtemps les allusions
fréquentes et non dissimulées faites lors de colloques, ainsi que celles de
législateurs particuliers, de journalistes et de spécialistes en sciences
politiques au Canada. Les efforts déployés pour représenter la population et
étudier les lois constituent un emploi à plein temps, on pourrait même parler
d'une profession. Les corps législatifs devraient au moins offrir suffisamment
de latitude et d'appui institutionnel pour permettre aux hommes politiques de
fonctionner aussi efficacement dans leur lieu de travail que les joueurs de
hockey et les chiropracteurs dans le leur. Au cours des vingt dernières années,
la plupart des assemblées canadiennes ont connu d'importantes améliorations,
mais ce processus doit aller beaucoup plus loin il ne doit pas se limiter à
fournir des fonds pour de la recherche et pour les déplacements des députés
fédéraux et provinciaux. Les assemblées, et particulièrement le Parlement du
Canada, devraient préparer les citoyens qu'elles représentent aux changements
auxquels fera sans doute face notre société au cours des prochaines années.
L'argent nécessaire à donner un caractère plus professionnel au lieu de travail
des législateurs étant donné
l'importance actuelle des budgets fédéraux et provinciaux serait négligeable par rapport aux sommes que
l'on dépense sur le moindre programme public, et cette dépense serait beaucoup
plus facile à justifier devant la population que les augmentations de
traitement des députés fédéraux et provinciaux.
Il faudrait, entre autres, accorder aux législateurs une plus, grande
latitude dans le cadre des travaux en comité. Plusieurs participants au sixième
colloque ont indiqué que le relâchement de la discipline de parti au sein des
comités serait utile et même bénéfique. En fait, plusieurs législatures ont
déjà adopté une telle ligne de conduite et les participants n'ont fait part
d'aucune atteinte grave au principe vital de la discipline de parti. En
accordant aux comités la liberté de formuler les politiques publiques et
d'enquêter à leur sujet, on permettra aux assemblées législatives de mieux
répondre aux exigences du public au cours des dernières années de ce siècle
difficile.
M. John Butt de l'Assemblée législative de terre-neuve, et le journaliste
W.A. Wilson ont fait une remarque importante: le rôle du législateur change
sans qu'il s'en rende compte, parce que les intérêts et les priorités de la
population suivent l'évolution rapide de la société. Comme l'a indiqué M.
Wilson, bon nombre des principales préoccupations de la population
d'aujourd'hui l'environnement, la situation de la femme. le
mouvement de défense des consommateurs ont vu le jour à l'extérieur du
processus politique, mais à la vue du publie. On aurait toutefois pu lui
répliquer que les assemblées législatives ont réagi à ces préoccupations et ont
donc eu un rôle à jouer. Les assemblées législatives dotées d'installations
adéquates, et les partis prêts à laisser de côté la discipline de parti. dans certaines circonstances, pourraient même prédire ce que
les médias doivent se contenter de rapporter. Les observations de M. Wilson
appuyaient celles de John Butt. Au cours du processus complexe par lequel les
politiques du gouvernement reflètent les préoccupations de la population, les
assemblées législatives d'aujourd'hui sont loin d'être les seules à attirer
l'attention. Comme J'a indiqué .M. Butt. le Parlement est en concurrence aujourd'hui avec bon nombre
d'autres institutions. notamment les groupes
d'intérêt, les partis, les médias et la bureaucratie. Il croit en fait que ces
gens ont autant voix au chapitre que les députés dans le cadre des décisions du
cabinet. (p. 35)
La participation au colloque de deux anciens chefs de parti, MM. Robert
Stanfield et T.C. Douglas, nous rappelle ce que le Parlement a perdu lorsqu'ils
ont pris leur retraite. On ne se souvient pas des hommes politiques seulement à
cause de leurs prouesses parlementaires ou de leurs victoires électorales. Leur
contribution à ce colloque est une autre preuve de leur dévouement et de leur
honnêteté, leurs sentiments humanitaires devraient être un exemple et servir à
dissuader ceux qui veulent faire passer l'esprit de parti au-dessus des
principes ou du bien public.
En dernier lieu, point n'est besoin de justifier l'existence du colloque
parlementaire régional canadien car il est évident qu'il suscite des débats
éclairés, mais il est moins facile de justifier la piètre qualité du compte
rendu du dernier colloque aux yeux des lecteurs intéressés. Une fois imprimé,
le procès-verbal des séances constitue un rapport public officiel. Il n'y a
aucune excuse pour la mauvaise qualité du texte définitif, on a même réussi à
faire une erreur dans la transcription des paroles de l’hymne national 0 Canada (p. 19). Sans doute
peu de gens lisent des tels comptes rendus, mais l'Association parlementaire
canadienne devrait traiter ces lecteurs avec un peu plus de respect. La seule
bonne chose que l'on puisse dire. c'est que ces
quelques douzaines d'erreurs sont réparties de façon admirablement impartiale
entre les deux langues officielles.
George Kerr, professeur
École de journalisme, Université de Western Ontario, London (Ontario)
|