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François Côté
Du 4 au 7 juillet 2008, l'Assemblée nationale du Québec a accueilli les
parlementaires francophones pour la 34e Session de l'Assemblée parlementaire
de la Francophonie (APF). Un nombre record de 447 délégués, issus d'une
cinquantaine d'assemblées et organisations parlementaires, ont participé
aux activités de la Session qui coïncidaient avec les festivités du 400e
anniversaire de la ville de Québec. Outre la réunion de l'Assemblée plénière,
ce rendez vous a permis au Bureau de l'APF, aux quatre commissions permanentes,
au Réseau des femmes parlementaires et à l'Assemblée régionale Amérique
de l'APF de réaliser leurs travaux. En marge de la Session de l'APF et
des festivités du 400e, une prestigieuse Conférence des présidents d'Assemblée
parlementaire de la Francophonie s'est également tenue sur la colline parlementaire
le 4 juillet 2008. Cet article propose un retour sur ces événements mémorables
de l'été.
L'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) est un lieu de débats,
de propositions et d'échanges d'informations. En tant qu'Assemblée consultative
de la Francophonie, l'APF se voulait à l'origine le reflet et le témoin
du pluralisme culturel des peuples francophones. Aujourd'hui, son action
vise également à promouvoir et à défendre la démocratie, l'État de droit,
le respect des droits de la personne, le rayonnement international de la
langue française et la diversité culturelle. L'APF est composée de 77 parlements
et organisations interparlementaires constitués en sections. Celles-ci
se réunissent annuellement en Assemblée plénière pour débattre de sujets
qui importent aux citoyens et aux parlementaires francophones. L'APF fixe
habituellement son ordre du jour en tenant compte des priorités établies
lors des Sommets des Chefs d'État et de gouvernement de la Francophonie.
En l'occurrence, le débat général portait sur le thème de L'environnement
et le développement des sociétés, l'un des enjeux au programme du Sommet
de la Francophonie de 2008.
Les travaux de la XXXIVe Session se sont déroulés sous la présidence de
M. Guy Nzouba Ndama, président de l'Assemblée nationale du Gabon et président
de l'APF. Dans le cadre de la séance solennelle d'ouverture, le secrétaire
général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), M. Abdou
Diouf, a notamment qualifié Québec de « symbole flamboyant de la présence
francophone en Amérique du Nord »1 et a remercié l'APF
de contribuer à alimenter
la réflexion et étayer les actions de la Francophonie dans « un combat commun
au service de la langue française, de la diversité linguistique et culturelle,
de la solidarité et du développement, de la démocratie, des droits de l'Homme
et de la paix »2. Le secrétaire général a ensuite, comme le veut l'usage,
livré son rapport annuel des activités de la Francophonie et répondu aux
questions des parlementaires.
À l'occasion de l'ouverture du débat général sur L'environnement et le
développement des sociétés, M. Steven Guilbault, cofondateur de l'organisme
québécois Équiterre, a livré, à titre d'expert invité, un discours de sensibilisation
au développement durable. Une résolution sur ce thème, proposée par la
Commission de la coopération et du développement, a ensuite été adoptée
par l'Assemblée plénière. Cette résolution encourage les États et les gouvernements
membres de la Francophonie à ratifier et à faire appliquer sans délai les
conventions et les accords internationaux portant sur la protection de
l'environnement, à intégrer le concept de développement durable dans leurs
législations, voire dans leur constitution, à travailler de façon multilatérale
et multidimensionnelle à réduire les émissions de gaz à effets de serre,
à se pencher sur le développement des énergies renouvelables ainsi qu'à
intensifier la lutte contre la désertification et la déforestation, notamment
dans les régions tropicales. L'APF demande également à l'OIF d'allouer
davantage de ressources financières à l'accroissement des capacités institutionnelles
des États de la Francophonie pour l'élaboration et la mise en uvre des
stratégies nationales de développement durable.
D'autres thèmes d'actualité ont également été abordés au cours de la Session
plénière. Le président de l'Assemblée nationale du Sénégal, M. Macky Sall,
est notamment intervenu sur la Crise alimentaire et la cherté de la vie,
sujet qui a suscité de nombreux échanges entre les parlementaires et a
conduit à une résolution demandant l'augmentation de l'aide alimentaire
provenant du Programme alimentaire mondial, des États bailleurs de fonds
et de la communauté internationale. Face à l'actuelle flambée des prix
des produits alimentaires et aux conséquences sociales, politiques et internationales
qui en découlent, l'Assemblée a également invité l'OIF à tenir un débat
d'urgence sur ces enjeux lors du prochain Sommet de la Francophonie.
L'impasse dans laquelle se trouvent plongées les négociations commerciales
multilatérales de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a également
fait l'objet d'une résolution proposée par la section du Québec à la Commission
de la coopération et du développement. Cette résolution appelle à une relance
du processus de Doha dans un esprit de compromis pour un commerce libre
et plus équitable, dans le respect des contraintes des pays en développement
et des pays moins avancés.
En outre, les participants ont également adopté une résolution sur l'avenir
de TV5 monde, dans laquelle ils saluent l'accord garantissant le caractère
multilatéral de la chaîne francophone et recommandent aux États membres
de la soutenir en tant qu'institution phare de la Francophonie, en raison
de son rôle central dans l'expression de la diversité culturelle.
Soulignons enfin que dans l'exercice de son rôle de vigie de la démocratie
dans l'espace francophone, l'APF examine rigoureusement la situation de
certains pays fragilisés par diverses formes de crises politiques. Cette
année, sur proposition de la Commission politique, elle a notamment condamné
les attentats commis à l'encontre de parlementaires au Burundi et au Liban
ainsi que les actes de violence perpétrés contre la population civile au
Liban, en Mauritanie, en Palestine et en République démocratique du Congo
(RDC). L'Assemblée a également souhaité l'envoi d'une mission d'information
au Burundi et d'une mission d'évaluation au Tchad et en République centrafricaine
(en collaboration avec l'OIF). De plus, les parlementaires proposent à
l'OIF de s'engager dans les prochaines étapes de la consolidation des institutions
et du processus de paix en RDC et de poursuivre son soutien à la transition
en cours en Côte d'Ivoire.
Autres réunions
Le Bureau, organe exécutif de l'APF qui contrôle la mise en uvre des décisions
de l'Assemblée plénière, s'est réuni à Québec le 2 juillet dernier avec
l'objectif de dresser le bilan de la dernière année et discuter des orientations
futures de l'APF, surtout à l'égard des travaux des commissions et des
divers programmes de l'organisation.
L'APF mène également un important travail de réflexion dans ses quatre
commissions permanentes, soit la Commission des affaires parlementaires
(CAP), la Commission de la coopération et du développement (CCD), la Commission
politique (CP) et la Commission de l'éducation, de la communication et
des affaires culturelles (CECAC). L'Assemblée se prononce sur la base des
rapports de ces commissions. Outre les thèmes ayant fait l'objet de résolutions
adoptées en séance plénière, les commissions se sont penchées sur des thèmes
aussi variés que l'accès à l'information parlementaire pour les citoyens
et la vie des assemblées dans l'espace francophone (CAP), l'agriculture
dans l'espace francophone et la contribution de la Francophonie à l'adoption
de stratégies nationales de développement durable (CCD), l'application
de la Déclaration de Bamako (CP), la diversité culturelle et la lutte contre
le VIH/SIDA (CECAC).
Enfin, le Réseau des femmes parlementaires travaille à promouvoir une meilleure
participation des femmes à la vie politique, économique, sociale et culturelle
et à renforcer la place et le rôle des femmes dans les parlements membres
et dans les organisations internationales. Lors de la réunion de Québec,
le Réseau, créé en 2002 à l'initiative des sections du Québec et du Canada,
a abordé les thèmes des droits de l'enfant, de la situation des femmes
réfugiées et de la traite des personnes.
D'ailleurs, en réaction à la libération de la franco-colombienne Ingrid
Bétancourt le 4 juillet 2008, les femmes parlementaires ont composé une
déclaration dans laquelle elles se réjouissent de la libération de l'ancienne
sénatrice et expriment leur soutien aux otages détenus par les FARC en
Colombie ainsi qu'à tous les autres otages retenus ailleurs dans le monde,
en particulier les femmes et les enfants. Cette déclaration a ensuite été
reprise par la Commission politique pour être finalement adoptée à l'Assemblée
plénière.
Résolution sur les Jeux olympiques de Vancouver
L'APF compte quatre grandes régions : Afrique, Amérique, Asie-Pacifique
et Europe. La région Amérique, dont le secrétariat est hébergé par l'Assemblée
nationale du Québec, a tenu sa XXIVe Session quelques jours avant celle
de l'APF, soit les 1er
et 2
juillet 2008. Une soixantaine de parlementaires provenant des assemblées
législatives de l'Alberta, du Canada, de la Colombie-Britannique, de
l'Île-du-Prince-Édouard, de la Louisiane, du Maine, du Manitoba, du
Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, de l'Ontario, de la Saskatchewan et du
Québec ont débattu de la conservation du patrimoine (section du Québec), des
parlements jeunesse francophones (section de l'Ontario) et de la dualité
linguistique lors des Jeux olympiques et paralympiques de Vancouver en 2010
(section du Canada).
Le thème de la dualité linguistique a fait l'objet d'une résolution dans
laquelle la région Amérique recommande à l'OIF d'instituer un poste de
Grand Témoin de la Francophonie d'Amérique pour les Jeux, dont le mandat
serait de sensibiliser le Comité organisateur des Jeux olympiques et paralympiques
de Vancouver au respect du statut officiel de la langue française, conformément
à la règle 24 de la Charte olympique. En outre, les parlementaires rappellent
au réseau Globemedia son engagement à assurer une télédiffusion des Jeux
en français, de façon complète et accessible. La région Amérique de l'APF
a transmis la résolution au Comité organisateur des Jeux olympiques et
paralympiques de Vancouver 2010 ainsi qu'aux nombreuses autorités publiques
qui y sont associées, entre autres, les gouvernements de la Colombie-Britannique
et du Canada.
Renforcement de la démocratie parlementaire
À l'instigation du président de l'Assemblée nationale du Québec s'est concrétisée
l'idée de faire revivre l'expérience des Conférences des présidents d'Assemblée
parlementaire de la Francophonie, dont la dernière édition datait de 1995.
Les présidents et les vice-présidents de 45 parlements de la Francophonie
se sont réunis le 4 juillet 2008 à la salle de l'Assemblée nationale pour
échanger sur leur rôle et sur les moyens à leur disposition pour renforcer
la démocratie parlementaire au sein de leur assemblée respective. Après
l'exposé de M. Louis Massicotte, titulaire de la nouvelle Chaire de recherche
sur la démocratie et les institutions parlementaires de l'Université Laval,
les présidents d'assemblée présents ont pris la parole et ont échangé leur
point de vue sur les moyens à mettre en uvre pour améliorer l'efficacité
des institutions démocratiques. Ils se sont également penchés sur l'importance
de la participation des citoyens à la vie politique.
À l'issue de cette journée, une déclaration finale a été adoptée à l'unanimité
prônant un renforcement des pratiques démocratiques et misant sur la revalorisation
du rôle du parlementaire. Les présidents et vice-présidents d'assemblée
parlementaire entendent encourager une participation accrue des citoyens,
en particulier les femmes et les jeunes, grâce à une meilleure sensibilisation
au rôle et au fonctionnement des assemblées législatives et à l'ouverture
des portes de toutes les enceintes parlementaires au public. De plus, ils
s'engagent à prendre les mesures requises pour renforcer les capacités
des assemblées à adopter les lois et à contrôler le budget et les actes
des gouvernements dans l'intérêt des populations. Ils ont d'ailleurs réitéré
l'importance de renforcer les compétences essentielles au meilleur exercice
de leur rôle de président et, à cet égard, se sont engagés à favoriser
les échanges entre eux afin de consolider la démocratie dans toute l'aire
francophone.
Le XIIe Sommet de la Francophonie
Dans le monde entier, environ 200 millions de personnes parlent français.
En nombre de locuteurs, les francophones se situent au 9e rang mondial
des communautés linguistiques. Les activités de juillet gravitaient autour
de cet axe central qu'est la langue française. La ville de Québec, dans
la célébration de ses 400 ans d'histoire, constituait un endroit de choix
pour tenir ces rassemblements, d'autant plus qu'elle a accueilli, du 17
au 19 octobre 2008, le XIIe
Sommet des Chefs d'État et de gouvernement
des pays ayant le français en partage, mieux connu sous le nom de Sommet
de la Francophonie.
Le Sommet de la Francophonie a traité cette année des enjeux suivants :
la démocratie et l'État de droit; la gouvernance économique; l'environnement
et la langue française. À titre d'Assemblée consultative de la Francophonie,
l'APF a adopté en juillet un Avis destiné aux chefs d'État et de gouvernement
de l'espace francophone que son président, M. Guy Nzouba Ndama, transmettra
lors du Sommet. Cet Avis incluait les textes adoptés lors de l'Assemblée
plénière de l'APF ainsi que le suivi des plans d'action adoptés antérieurement
par l'organisation.
En ce qui concerne l'Assemblée nationale du Québec, l'accueil de parlementaires
et de présidents d'assemblée législative fût des plus enrichissants pour
nos députés et pour l'institution. Les nombreux échanges ont permis aux
parlementaires de découvrir ou redécouvrir l'espace francophone et de créer
des liens solides avec leurs pairs. Notre institution a profité d'une opportunité
exceptionnelle pour se positionner au cur de la Francophonie parlementaire.
Notes
1. Discours de SE M. Abdou Diouf, secrétaire général de la Francophonie,
XXXIVe Session de l'APF, Québec (Québec) 4 - 7 juillet 2008.
2. Discours de SE M. Abdou Diouf, secrétaire général de la Francophonie,
XXXIVe Session de l'APF, Québec (Québec) 4 - 7 juillet 2008.
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