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Geoffrey Kelley, MAL
Le développement durable est un concept très large qui touche différentes
facettes de la vie quotidienne des organisations et des personnes. L'auteur
examine les réalisations de l'Assemblée nationale du Québec et d'autres
parlements en matière de promotion du développement durable.
L'usage de l'expression « développement durable » s'est répandu avec la publication
en 1987 d'un rapport intitulé Notre avenir à tous (aussi appelé le rapport
Brundtland), un document produit par la Commission des Nations Unies sur
l'environnement et le développement. Le rapport Brundtland définit ainsi
le développement durable :
Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du
présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre
aux leurs.
Plus tard, en 1992, à Rio de Janeiro au Brésil, les participants à la Conférence
des Nations Unies sur l'environnement et le développement durable, y compris
le premier ministre Jean Charest, qui était à l'époque ministre fédéral
de l'Envrionnement, endossaient cette notion. Pour eux, le développement
durable était une avenue incontournable pour assurer le bien-être des communautés
humaines et la préservation des écosystèmes qui entretiennent la vie.
En 2002, lors du Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg
en Afrique du Sud, les dirigeants qui étaient présents ont renouvelé leur
engagement quant aux objectifs fixés à Rio en s'engageant à traduire leurs
positions par des actions concrètes, notamment en mettant en uvre des
stratégies nationales pour le développement durable.
En fait, qu'il s'agisse de l'administration publique, des institutions
parlementaires ou des organisations privées, les progrès de nos sociétés
en matière de développement durable dépendront de l'action combinée de
chacun des acteurs que nous sommes.
À titre de parlementaires membres d'institutions qui constituent le fondement
des démocraties modernes, nous avons la responsabilité d'exercer un leadership
fort afin de nous assurer que nos administrations deviennent des modèles.
Au Québec, la Loi sur le développement durable (2006) a modifié la Loi
sur le vérificateur général afin de prévoir la nomination d'un commissaire
au développement durable faisant partie de l'effectif du Vérificateur général
du Québec, instance qui relève elle-même de l'Assemblée nationale. Le
Commissaire déposera un rapport annuel, et témoignera de ses constats devant
un comité permanent de l'Assemblée. Ceci fournira aux parlementaires un
outil précieux lorsqu'ils examineront les plans de développement durable
provenant de chaque ministère et agence du gouvernement.
De plus, cette Loi définit 16 principes qui doivent être pris en compte.
Ces principes sont un guide pour agir dans une perspective de développement
durable et reflètent les principes de la Déclaration de Rio sur l'environnement
et le développement.
Vous me permettrez ici d'énumérer quelques-uns de ces principes et de les
décrire brièvement afin d'illustrer l'étendue des champs d'intervention
possibles en faveur du développement durable.
Ces principes favorisent l'intégration des considérations sociales, économiques
et environnementales. Par exemple :
-
Santé et qualité de vie Les êtres humains, la protection de leur santé
et l'amélioration de leur qualité de vie sont au centre des préoccupations
relatives au développement durable. Chacun d'entre nous devrait pouvoir
poursuivre une vie saine et productive, en harmonie avec la nature;
-
Égalité et justice sociale Les actions de développement doivent être
entreprises dans un souci d'équité intra et intergénérationnelle ainsi
que d'éthique et de justice sociale, en prenant en considération notre
population de plus en plus hétérogène;
-
Protection de l'environnement Pour parvenir à un développement durable,
la protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus
de développement;
-
Efficacité économique L'économie du Québec et de ses régions doit être
performante, porteuse d'innovation et d'une prospérité économique favorable
au progrès social et respectueuse de l'environnement;
-
Participation et engagement La participation et l'engagement des citoyens
et des groupes qui les représentent sont nécessaires pour définir une vision
concertée du développement et assurer sa durabilité sur les plans environnemental,
social et économique;
-
Prévention En présence d'un risque connu, des actions de prévention,
d'atténuation et de correction doivent être mises en place, en priorité
à la source;
-
Protection du patrimoine culturel Le patrimoine culturel, constitué de
biens, de lieux, de paysages, de traditions et de savoir, reflète l'identité
d'une société. Il transmet les valeurs de celle-ci de génération en génération,
et sa conservation favorise le caractère durable du développement. Il importe
d'assurer son identification, sa protection et sa mise en valeur, en tenant
compte des composantes de rareté et de fragilité qui le caractérisent;
-
Production et consommation responsables Des changements doivent être
apportés dans les modes de production et de consommation en vue de rendre
ces dernières plus viables et plus responsables sur les plans social et
environnemental, entre autres par l'adoption d'une approche d'écoefficience,
qui évite le gaspillage et qui optimise l'utilisation des ressources.
Ces principes servent d'outil d'analyse, autant pour le Commissaire au
développement durable et pour les parlementaires. Quelques initiatives
gouvernementales récemment mises en uvre sont le reflet direct des principes
énumérés ci-haut. Ces initiatives comprennent :
1. le plan québécois d'énergie (2006), qui annonce la mise en uvre de
projets additionnels en matière d'hydro-électricité et d'énergie éolienne,
y compris Eastmain I-A (900 mw/h), La Romaine (1,400 mw/h) et les nouveaux
projets éoliens (2,500 mw/h);
2. la création du poste de « forestier en chef » en 2005, afin d'assurer
une gestion plus prudente des forêts québécois;
3. la conservation des terrains à caractère unique à l'intérieur des aires
protégées, et la création de nouveaux parcs. Depuis 2003, les aires protégées
ont doublé de 3 % à 6 % de notre surface. L'objectif est de porter ce pourcentage
à 8 %.
Voilà les mesures que nous avons entrepris afin de renforcer nos rôles
législatifs en matière de développement durable. Mais, comment fonctionne
notre gestion de ce dossier à l'interne? Est-ce que notre propre Assemblée
est « verte »?
Le 28 mai dernier, l'Assemblée nationale du Québec a lancé une consultation
auprès des membres de l'Association canadienne de l'administration parlementaire
(ACAP) , les invitant à transmettre des informations sur les politiques,
les programmes ou autres initiatives en matière de développement durable
adoptés au cours des dernières années et qui s'appliquent aux députés et
au personnel de leur assemblée législative respective. Onze assemblées
législatives ont répondu à notre demande. Selon les réponses reçues, la
plupart des actions mises en place jusqu'à présent ont surtout été consacrées
à la protection de l'environnement et à la gestion des matières résiduelles.
Par exemple, le Sénat et la Chambre des communes ont établi des programmes
de gestion environnementale sur la colline Parlementaire. Les édifices
du parlement canadien étant la responsabilité du ministère des Travaux
publics et Services gouvernementaux du Canada, ils sont assujettis à la
Stratégie de développement durable 2007-2009 appliquée à tous les édifices
occupés par le gouvernement fédéral. Ils ont également adopté certaines
mesures additionnelles spécifiques à leur personnel et à leur administration.
Ainsi, en plus des programmes usuels de recyclage et de récupération, destinés
aux matières résiduelles, les appels d'offres et les politiques d'achat
contiennent des considérations de développement durable; les navettes circulant
sur la colline Parlementaire sont alimentées en partie à l'éthanol et un
projet d'acquisition d'un autobus à l'hydrogène est en cours. Les employés
bénéficient de rabais sur les laissez-passer mensuels du transport en commun,
le covoiturage est encouragé et un programme de reconnaissance souligne
les initiatives de protection de l'environnement.
L'Assemblée législative de l'Ontario a, pour sa part, mis en place des
mesures pour le recyclage du papier, du carton, du plastique, des cannettes,
des cartouches d'encre et des piles usagées de même que pour certaines
matières dangereuses. De plus, des mesures d'économie d'énergie ont été
déployées. L'Assemblée législative du Manitoba se conforme comme c'est
sans doute le cas pour toutes les autres provinces à la politique générale
de leur gouvernement. En Colombie- Britannique, un comité parlementaire
a été mandaté pour analyser la problématique.
Au Québec, l'Assemblée nationale a déjà posé un certain nombre de gestes
en matière de protection de l'environnement. Nous n'en sommes pas à nos
premiers pas en cette matière. Parmi les mesures déjà mises en place, notons
celles-ci :
-
déjà, il y a quelques années, des gestes importants ont été posés pour
réduire la consommation de papier. La nouvelle procédure relative au dépôt
de documents, qui ordonne maintenant aux ministères de fournir un support
électronique de tout document déposé, est un exemple des mesures mises
en place par l'Assemblée nationale;
-
de plus, l'Assemblée nationale s'est associée au Réseau de transport de
la Capitale, à Autocar Québec et à la Société de transport de Lévis afin
de favoriser l'utilisation du transport en commun par ses employés;
-
les lumières des édifices de l'Assemblée nationale du Québec ont été éteintes
le samedi 29 mars 2008, entre 20 heures et 21 heures à l'occasion de l'Heure
de la Terre (Earth Hour), un vaste mouvement mondial pour attirer l'attention
du grand public à l'idée qu'une modification mineure à notre vie quotidienne
peut faire beaucoup pour améliorer l'environnement de notre planète;
-
enfin, le 31 mai 2008, nous avons fermé le dernier des fumoirs à l'Assemblée.
Nous travaillerons dorénavant dans un édifice sans fumée.
D'autres gestes ont été posés, notamment en ce qui concerne la récupération
de papier et autres matières usuelles, le changement des lumières pour
des ampoules fluocompactes, la mise en place de commandes centralisées,
l'utilisation de cartouches d'encre recyclées, s'assurer que des contenants
de matières à recycler sont à la disposition des employé(e)s, et l'étude
de caractérisation sur les matières résiduelles.
Les autorités de l'Assemblée nationale ont cependant convenu de poursuivre
les efforts et déployer un train de mesures afin de témoigner davantage
de notre ferme volonté de contribuer à la protection de l'environnement
et au développement durable.
À cette fin, un comité représentatif de tous les secteurs d'activités de
l'Assemblée a été mandaté par le secrétaire général afin de produire une
politique de développement durable pour l'Assemblée nationale. Ce comité
dont les travaux sont coordonnés par un cadre relevant directement du Secrétaire
général de l'Assemblée nationale, devra remettre son rapport avant la fin
du mois de septembre prochain. Un projet de politique de développement
durable devrait être présenté au Bureau de l'Assemblée nationale au cours
de l'automne 2008.
Ce comité pourra compter sur différentes sources d'inspiration :
-
La Commission permanente des transports et de l'environnement a récemment
mené une consultation sur la gestion des matières résiduelles, et a rendu
public son rapport le 10 juin dernier;
-
L'Assemblée nationale pourra également s'inspirer des meilleures pratiques
mises en place par les différents parlements à travers le monde de même
que par les ministères et organismes du gouvernement du Québec;
-
Nous essayons de trouver des moyens d'augmenter le rôle de l'informatique
dans les travaux de nos commissions parlementaires. La consommation de
papier entraînée par le processus législatif est énorme. Nous espérons
réduire nos besoins en papier par une utilisation accrue de l'informatique
pour la réduction des amendements (par exemple);
-
Enfin, le comité sera soutenu dans sa réflexion par la Chaire en Éco-conseil
de l'Université du Québec à Chicoutimi. L'un des objectifs de cette Chaire
est d'intervenir et collaborer, par le biais des services à la collectivité,
avec des partenaires externes à l'université (entreprises, regroupements
professionnels et organismes communautaires, gouvernements, etc.) pour
la formation et l'amélioration continue dans le domaine du développement
durable.
Il s'agit donc d'un mandat très stimulant, et je vous invite à suivre l'évolution
de ce dossier majeur pour l'Assemblée nationale. Comme je vous le mentionnais
précédemment, un projet de politique de développement durable devrait être
présenté dès le début de l'automne prochain. Une démarche de consultation
pourra alors être amorcée auprès de tous les intéressés à l'Assemblée nationale,
soit les parlementaires de même que le personnel politique et administratif.
Nous souhaitons ardemment que tous se sentent interpellés par les objectifs
que nous poursuivons et comptons sur l'adhésion de chacun pour formuler
des suggestions qui permettront de bonifier le travail qui aura été accompli
par le Comité de réflexion. À la suite de ces consultations, le Bureau
de l'Assemblée nationale pourra ultimement adopter la Politique de développement
durable de l'Assemblée nationale.
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