Revue parlementaire canadienne

Numéro courant
Région canadienne, APC
Archives
Prochain numéro
Guide de rédaction
Abonnez-vous

Recherche
AccueilContactez-nousEnglish

PDF
Entrevue avec le Bibliothécaire parlementaire du Canada


En décembre 2005, William R. Young a été nommé bibliothécaire parlementaire. À la fin de la première année de son mandat, M. Young parle à la Revue parlementaire canadienne de l’important rôle que joue la Bibliothèque en appuyant le travail du Parlement et de sa vision de l’avenir de l’institution.
 

Pourquoi souhaitiez-vous assumer le rôle de bibliothécaire parlementaire? 

Je dois dire que j’ai été honoré qu’on me choisisse pour tenir ce rôle, parce qu’il sollicite à la fois ma passion d’historien politique et mon intense désir d’aider les parlementaires à jouer leur rôle de représentants des Canadiens.  Pendant mes 19 ans à la Bibliothèque, j’ai acquis un immense respect pour les parlementaires en tant que personnes qui ont à cœur d’obtenir des résultats pour leurs concitoyens – c’est pourquoi je considère presque comme une vocation le fait de les aider en cela.  J’espère que mon expérience à la Bibliothèque et dans d’autres contextes m’aidera à faire preuve du leadership voulu pour tirer profit des succès antérieurs et relever les défis que présente la démocratie parlementaire au XXIe siècle. 

À votre avis, quel avantage vous donnent vos longues années de service à la Bibliothèque? 

Comme tout employé qui a été au service du Parlement pendant plus qu’un certain temps,  j’ai acquis un vif respect pour cette institution, un respect qui, allié à ma haute estime du personnel de la Bibliothèque et au profond respect qu’il m’inspire, est essentiel à qui veut faire preuve de leadership à la Bibliothèque du Parlement.  Ceux qui y travaillent forment vraiment un groupe de professionnels qui reconnaissent le caractère unique de la Bibliothèque et se sentent privilégiés d’y faire carrière.  Le moteur de la croissance et du développement de la Bibliothèque a toujours été l’engagement de son personnel à viser l’excellence.  Au fur et à mesure que nous changeons en nous adaptant à de nouveaux besoins et défis, je veux encourager le personnel à expérimenter de nouvelles façons de faire et à prendre des risques axés sur un changement constructif.  J’espère pouvoir contribuer à établir une culture où nous utilisons les règles et les processus pour promouvoir l’innovation et le progrès, et non pour y faire obstacle. 

Le rôle de la Bibliothèque a-t-il changé au cours des années? 

En ce qu’elle a de plus fondamental, non!  La Bibliothèque du Parlement a été créée pour apporter un soutien aux parlementaires en mettant à leur disposition l’information et la documentation dont ils ont besoin pour s’acquitter efficacement de leurs fonctions.  Cette raison d’être est toujours aussi valide aujourd’hui.  Avec les années cependant, il s’est produit un certain nombre de changements en ce qui regarde la portée du travail effectué par la Bibliothèque.  Au départ, elle abritait la collection nationale, qui loge maintenant à Bibliothèque et Archives Canada.  Aujourd’hui, notre Service de ressources d’information et de documentation (SRID) continue à constituer et à conserver les collections de documents – imprimés et électroniques – de la Bibliothèque et à y assurer l’accès; ces collections sont maintenant davantage axées sur les besoins des parlementaires. Dans les années 1960, une fonction de recherche a été ajoutée officiellement au rôle de la Bibliothèque, et aujourd’hui notre Service d’information et de recherche parlementaires (SIRP) fournit aux parlementaires et aux comités des services d’information, d’interprétation et de soutien analytique.  Un autre changement important est survenu en 1995, lorsque les Programmes parlementaires destinés au public (PPP) se sont ajoutés à la Bibliothèque, ce qui, essentiellement, a élargi notre mission de la responsabilité de fournir de l’information et du soutien uniquement aux parlementaires à celle de fournir en outre des renseignements sur le Parlement aux Canadiens, au nom des parlementaires. 

Quels défis la Bibliothèque doit-elle relever aujourd’hui? 

L’un des défis critiques que doit relever la Bibliothèque consiste à ajuster son travail pour aider les parlementaires à répondre aux attentes changeantes des Canadiens.  Ceux-ci veulent des débats parlementaires plus approfondis sur les politiques publiques, et la Bibliothèque doit travailler à faire en sorte que les parlementaires disposent des meilleurs outils possible pour répondre à cette attente.  Cela veut dire leur donner des informations non partisanes, équilibrées et adaptées à leurs besoins, des informations qui autrement ne seraient peut-être pas disponibles ou, du moins, pas sous la forme qui convient aux parlementaires ou au moment où ils en ont besoin. 

Évidemment, les outils, les processus et les compétences qui permettent à la Bibliothèque de jouer son rôle se sont transformés de façon frappante en raison des changements et des progrès qu’a connus la technologie.  Il s’est produit une véritable explosion de la quantité d’informations qu’on peut maintenant obtenir d’une variété infinie de sources, bonnes et moins bonnes.  Par conséquent, la Bibliothèque et son personnel doivent prendre conscience de ce qu’ils ne sont plus l’unique source d’information pour le Parlement; toutefois, cela ne veut pas dire que notre rôle ait perdu de son importance.  Au contraire, les parlementaires ont de plus en plus recours à notre personnel pour les aider à s’y retrouver dans le « trop-plein » d’information dans lequel ils sont plongés quotidiennement.  Les employés de la Bibliothèque ont un sens aigu de l’information qui est nécessaire, du moment où elle est requise et de la forme à lui donner.  Ce sont des recherchistes, des bibliothécaires et des communicateurs d’un niveau de compétence et de connaissances très élevé, qui collaborent pour obtenir des renseignements dignes de foi, les analyser, en faire la synthèse et les présenter aux parlementaires sous une forme qui répond à leurs besoins précis. À mesure que la Bibliothèque s’éloigne d’un rôle consistant tout simplement à fournir de l’information pour devenir de plus en plus un gestionnaire et un courtier du savoir, je considère qu’une de mes grandes priorités est de veiller à ce que notre personnel soit correctement organisé, motivé et équipé pour réussir. 

Qu’espérez-vous réaliser en tant que bibliothécaire parlementaire? 

Comme je l’ai déjà dit, j’ai un sens aigu de ce que les parlementaires tentent de faire et cela me motive à les aider à le faire aussi efficacement que possible.  Ainsi, en plus de trouver de nouvelles manières d’améliorer les produits et les services que nous fournissons directement aux parlementaires, je veux faire en sorte que la Bibliothèque soit le type d’organisation bien gérée et souple qui demeure actuelle et au diapason des besoins changeants de ses clients.  Autrement dit, la Bibliothèque donnera sa pleine mesure lorsqu’elle aura mis de l’ordre dans ses affaires. 

À cet égard, j’ai consacré une bonne partie de l’année à tenter de préciser, avec l’aide des gestionnaires de la Bibliothèque, nos besoins et les défis que nous devons relever en tant qu’organisation appelée à fonctionner dans le contexte parlementaire. Nous avons retenu les services d’experts de l’extérieur pour nous aider et nous avons largement consulté les personnes qui, en première ligne, offrent des services directement aux parlementaires et aux Canadiens.  En passant, j’aime comparer le travail accompli au cours de la dernière année à l’évaluation et à la planification que nous avons faites pour préparer le projet de rénovation de l’édifice de la Bibliothèque, qui s’est échelonné sur quatre ans et qui s’est terminé plus tôt cette année.  Ce n’était pas une mince tâche que de préserver la beauté historique et symbolique de l’édifice originel de la Bibliothèque tout en le dotant de la technologie et de l’infrastructure requises pour répondre aux besoins d’un Parlement moderne.  La tâche a exigé beaucoup d’étude et de réflexion, la participation d’experts de l’extérieur en génie et en architecture et des milliers d’heures de planification minutieuse.  Le renforcement des assises de la Bibliothèque comme organisation exige le même genre de démarche systématique... toujours afin de répondre aux besoins d’un Parlement moderne. 

Au cours de ma deuxième année à titre de bibliothécaire parlementaire, je prendrai des mesures dans tous les domaines où un certain travail s’impose.  De fait, nous avons déjà commencé.  L’équipe de gestion de la Bibliothèque a examiné et mis à jour les énoncés de mission et de vision de la Bibliothèque et fait progresser la mise en place de systèmes de planification des activités et de mesure du rendement dont nous aurons besoin pour soutenir nos activités.  En décembre, la Bibliothèque a accueilli une nouvelle directrice générale des services intégrés, qui nous fait profiter de sa vaste expérience du renouvellement de la façon dont les organisations mènent leurs activités et de la gestion du changement organisationnel.  L’équipe de gestion travaille également à l’amélioration des pratiques de la Bibliothèque dans les secteurs des ressources humaines et des communications, afin de renforcer le leadership à tous les niveaux et de favoriser une plus grande participation du personnel à la planification et à l’atteinte de résultats.  Notre objectif est très clair – nous édifions l’infrastructure de gestion dont nous avons besoin pour que la Bibliothèque du Parlement soit une organisation bien administrée, souple et dynamique, qui continue à se consacrer résolument à servir le Parlement et les Canadiens aussi bien dans le présent et l’avenir qu’elle l’a fait dans le passé. 

De quelle façon la Bibliothèque conçoit-elle… et concevez-vous… le service à la clientèle? 

Bon, la Bibliothèque est une organisation de service axée sur la clientèle qui, depuis longtemps, tente de trouver des façons nouvelles et meilleures de répondre aux besoins de ses clients.  C’est pourquoi, tout en prenant des mesures pour renforcer nos capacités de gestion internes, nous n’avons pas cessé d’apporter progressivement une série d’améliorations aux services que nous offrons. 

Pour ce qui est des parlementaires, nous ne dévions pas de notre but de leur fournir un accès rapide à une information équilibrée et aux services d’un personnel bien renseigné et en mesure de tirer profit des technologies les plus récentes.  Au cours de la dernière année, par exemple, nous avons amélioré PARLMEDIA, notre système électronique de suivi des nouvelles, qui permet maintenant aux parlementaires de choisir le moment et la fréquence des avis électroniques concernant les articles des journaux du jour ou des questions auxquelles ils s’intéressent.  Nous avons également élargi notre base de données électronique PARLINFO en y ajoutant des bibliographies interrogeables de documents publiés par les parlementaires actuels. 

Évidemment, la création du poste de directeur parlementaire du budget est devenue pour nous un défi immédiat, puisque le gouvernement a décidé de le situer dans la Bibliothèque.  À mon avis, il s’agit d’une excellente occasion d’appuyer de façon importante les tentatives des parlementaires d’examiner en profondeur la façon dont le gouvernement gère l’argent que lui confient les Canadiens.  Il va de soi que nous devons déterminer soigneusement quelle est la meilleure façon de fournir un tel service dans le cadre de notre organisation, et nous avons déjà commencé à étudier les solutions qui s’offrent à nous.  À ce sujet, nous avons demandé à l’Association canadienne des ex-parlementaires de nous aider à tirer profit de l’expérience des anciens parlementaires et de leur façon de voir l’examen législatif des dépenses publiques.  Je tiens à souligner que la création de partenariats avec des organisations de l’extérieur, y compris les autres législatures et les associations de bibliothèques de tout le Canada et d’autres pays, est une autre façon pour nous de continuer à chercher de nouvelles manières d’améliorer l’utilité de nos programmes et services au fil du temps. 

Enfin, nous continuerons d’examiner et d’évaluer les produits, les programmes et les services que nous offrons au cours des prochains mois, et je ne puis insister suffisamment sur l’importance de consulter de façon systématique les parlementaires pour profiter de leur expérience et de leurs opinions : une communication plus étroite et un marketing ciblé sont essentiels pour que la Bibliothèque puisse répondre aux besoins d’un Parlement du XXIe siècle 

Et les Canadiens – où se situent-ils dans ce tableau? 

C’est maintenant une évidence que les démocraties parlementaires partout dans le monde se heurtent de plus en plus au cynisme et au scepticisme du public.  Quel organisme est mieux placé que la Bibliothèque pour soutenir les parlementaires dans leurs tentatives de rapprocher toujours plus efficacement leurs électeurs et le Parlement?  Je crois qu’il est essentiel, pour maintenir la confiance et le respect des Canadiens envers les traditions et les processus démocratiques du pays, de leur offrir des renseignements qui sont fiables et font autorité sur la façon dont fonctionne le Parlement. 

Nous pouvons pour cela mettre à profit beaucoup d’éléments, car nous offrons déjà un large éventail d’occasions uniques d’établir un contact avec le Parlement et d’en apprendre davantage sur son fonctionnement.  Ainsi, nos guides parlementaires font connaître chaque année le Parlement, ainsi que le magnifique édifice principal nouvellement rouvert de la Bibliothèque, à des centaines de milliers de visiteurs.  Nos documents et programmes didactiques ont remporté des prix et sont utilisés partout au Canada et à travers le monde.  En novembre, les présidents du Sénat et de la Chambre des communes ont accueilli la 10édition du Forum des enseignantes et des enseignants sur la démocratie parlementaire canadienne.  Il s’agit d’une activité annuelle, organisée par la Bibliothèque et qui réunit à Ottawa des enseignants de tout le pays pour leur permettre de rencontrer les parlementaires et de mieux comprendre les enjeux fondamentaux de la gouvernance démocratique contemporaine. Au fil des ans, les enseignants ont louangé ce programme en disant qu’il leur avait permis d’améliorer de façon remarquable leur compréhension de la valeur du travail que font les parlementaires et leur propre enseignement concernant le Parlement, la gouvernance, la démocratie et la citoyenneté. Nous nous employons actuellement à trouver des façons d’élargir l’audience de ce programme couronné de succès, en vue de sensibiliser davantage les Canadiens à la réalité parlementaire.  Devrions-nous, par exemple, examiner la possibilité de mettre sur pied des versions du Forum destinées aux aînés, aux dirigeants municipaux ou au secteur bénévole?  À mon avis, ce sont là autant d’idées qui méritent qu’on s’y arrête. 

Et qu’aimeriez-vous ajouter en guise de conclusion? 

Je répéterai tout simplement que je vois la Bibliothèque comme une institution axée sur la clientèle, qui s’appuiera pour l’avenir sur un dossier de réalisations éloquent.  La plupart des parlementaires sont ici parce qu’ils savent ce qu’ils veulent et qu’ils s’intéressent à la vie publique – ils sont ici pour accomplir quelque chose. Le travail de la Bibliothèque consiste à les aider à y réussir et à soutenir le processus délibératif à l’avantage de tous les Canadiens. 


Canadian Parliamentary Review Cover
Vol 29 no 4
2006






Dernière mise à jour : 2020-09-14